Contrainte à des travaux (forcés?) afin de financer la mise aux normes de sa salle de répèt’, un peu plus qu’indispensable, creuset de créations locales dont en live nous gobons avidement la teneur, La Briqueterie d’Amiens organise pour récolter des fonds, sur trois jours et excusez donc au passage du peu, un festival dédié à nos gloires du coin, qu’épaulent des formations venues d’un peu plus loin. Ce vendredi j’en fu(t)s, ce samedi tout pareil et dimanche pas de relâche, le lieu est bien trop précieux pour qu’on se préserve d’en être. A l’écoute d’Alan Regardin j’écris ces lignes, pour l’ouverture le rendu fut tout aussi expérimental, bien plus noise toutefois, avec la prestation de From Norway (Amiens – Rouen), aux triturations sonores-soniques stridentes et mettant en avant cassettes et vinyles, usés de manière déviante ça va sans dire. Apre, le registre exige un effort d’assimilation. Il n’empêche, la recherche porte ses fruits et recèle une réelle singularité. Nous optons pour le Picon, mon ex-collègue de collège et son compagnon de même que mon « pote de salles » Pascal étant aussi de la partie. Je jette un œil au merch, sacrément attirant, en sirotant le breuvage.
From Norway
Je me recentre alors, plus tard et en raison de nos incessants palabres je raterai le sax de Jean Detrémont. Toutes mes excuses grand homme, je me rattraperai. Toquard et son acolyte Oscar, infaillible batteur, déversent un putain de show. Variété rance, rock bancal et malgré ça de première main, destroy et percutant, touches électro qui la danse accentuent, à Toquard/Oscar il ne manque rien. On surkiffe toustes, le gars sait faire on n’en est pas dupe mais à chaque occurrence, il se réinvente et brillamment se relit, au gré d’un répertoire sans trop de limites. Il fait rire, headbanger, pogoter, s’en vient fendre la foule et à l’issue la gagne. Toquard est fort, ce soir il est de plus bien secondé. Son tube Avec mes copains teufeurs tiré de l’excellent Humeur Mépris, entre autres morceaux impactants aux rythmes débridés, dérouille les panards et sans exception aucune nous prenons le notre (de panard), à l’écoute d’un set maousse.
Toquard et Oscar
Second Picon, c’est alors le tour de l’Inné-Narrable alias Jason Binet. Solo, entre guitare noisy et vagues noise-indus qu’il s’est permis de « peaufiner », le gaillard prend la tangente. C’est ma came, toute en bruit certes mais dansable, portée par des rythmes dérangés. Masqué, l’Inné-Narrable étale un registre valable. Des bribes de voix s’en extirpent, une fois de plus et après ses venues aux Yeux et à l’AF nous tombons d’accord sur le relief de son set. De plus en plus « construit » me semble t-il, toutes proportions gardées bien entendu, celui-ci met Jason en valeur. Intense, il erre et de ses détours tire un bel élixir. A l’arrache et malgré l’heure tardive pour qui s’est enquillé une semaine en structure éducative, je décide de rester. Maxime et Lucie, de la fac d’arts, me permettent de tromper l’attente de manière agréable. Adorables, ils oscillent lors des concerts comme des pantins en joie. La Briqueterie on la chérit, j’y ai vu tant de lives probants que je peux envisager de la délaisser.
L’Inné-Narrable
Briket’ en fête, le Sale Défest bat son plein et Chiaroscuro de Lille, chargé de border le Friday, s’en acquitte au son d’un post-punk/cold-punk qui entre dans le lard. Offensif, chanté dans la langue de Bruno Bellone, le bazar de Chiaroscuro dévale presque aussi vite que l’ailier monégasque à l’époque du foot sans flouze. Le trio guette la porte…de sortie, d’un foutu monde dont il ne goûte que très moyennement l’oppressante grisaille. Il joue fort et vite, empile les bons morceaux, dans La Fange se vautre et ça lui réussit, son live ne fait pas un pli. Sa marchandise est de plus à prix libre, quel qu’en soit le support. Des vrais. Il termine rageusement, entre Frustration, Oï Boys et Joy Division dirai-je, le premier de trois soirs voués à la meilleure des causes, qui se poursuivent ce samedi en déroulant un programme à nouveau alléchant.
Chiaroscuro