Situé entre folk turc traditionnel et instrumentation plus modernisante, guitares psychédéliques éthérées et lignes de basses groovy, le groupe Israélien Şatellites m’a tout l’air d’un ovni sonore façon Altin Gün, doté de ce même sens du collage stylistique abouti. Son premier album, éponyme, va chercher vers l’Anatolie, l’Istanbul des 70’s et ce faisant, débouche sur l’une des créations les plus enthousiasmantes du moment. Dix titres qui dans la lancée de Big Baglama, ouverture dépaysante aux effluves de lointain, aussi souple qu’alerte, font mouche sans coup férir. Ca se confirme d’ailleurs sur Hudayda, où le saz d’Itamar Kluger fait sensation alors que la basse d’ Ariel Harrosh, rondelette, assure un groove incoercible, qui ne rate pas la cible. Adjoignons à ça le chant de Yuli Shafriri, racé. Les tambours de Raz Man, tout terrain, qui accentuent le déracinement. On tient là, c’est une certitude, un trésor de création sonore. Disko Arabesque, troisième envol à destination de terrains nouveaux, la valide d’ailleurs avec le même impact. Le quatuor, d’ores et déjà une révélation, place aussi quelques tourbillons psyché.
Avec Olurmu Dersin (feat. Vicki Ashkenazi), il transcende le folklore. Stylistiquement, il échappe à toute capture. C’est Şatellites, qui de toute sonorité fait merveille. Et qui, sans influence criarde, invente son langage. Zuhtu (live), presque tribal dans ses percussions, l’illustre magistralement. En live effectivement, ça doit valoir le détour. Guettons donc les dates du clan de Haïfa, et dans l’attente enfilons-nous sans compter ce disque qui nous fera jubiler. Et qui, au son de son Seni Sen Olduğun İçin Sevdim porteur de jolies traces de rock, vif et imparable, restera dans les têtes de ses convertis. Le morceau breake, vire psyché, puis trace à nouveau sans regarder dans le rétro. Jouissif. La rondelle sort chez Batov Records, où il est bon d’aller trainer. Les gimmicks de Yar Oi, ses soubresauts au bord du dub, ses chants féminins divins auront eux aussi raison de nos réticences, si toutefois certains en éprouvent. Ce n’est pas mon cas, je dansote à la casbah en percutant Yekte et ses bons gros riffs blues-rock. Du tout bon encore, à bouffer comme le Nutella, à la cuillère et à même le pot.
Photos Yonatan Cohen (Bubu).
Véritable machine à valser, Şatellites constitue une superbe surprise. Yağmur Yağar Taş Üstüne, à l’avant-dernier rang, débute dans la brume. Il s’anime, doucement. S’élève, sans imploser. Magnifique, délicat. Ici tout est réussite: le titre en question finit d’ailleurs, tout de même, par s’emballer. Il se raidit, mue en effort rock aussi psyché que nervuré. A la fin du chemin c’est Cecom, sur trois minutes posées et climatiques, ténues, qui se charge de boucler le bazar. Sa voix est belle, son fond fragile, après une série remuante Şatellites peut redescendre. Son disque est une merveille, dans son intégralité, face à laquelle on ne peut rester de marbre, tiré de nos bases par ses sons venus d’ailleurs et ses trames continuellement captivantes.