Bon, t’façon c’est simple. Laurent Santi dirige le label le plus pété de thune du monde, nommé Coeur sur Toi (parce que t’as du flouze) donc ses sorties respirent la caillasse et sonnent auto-tunées (et thunées tout court) à souhait. Ne vous étonnez donc pas si le You are still pure de Fructose Father, un marseillais sûrement plein aux as lui aussi, fricote avec l’underground le plus friqué qui puisse être, selon un panel qui dépayse et s’étend sur un champ (de biffettons) foutrement étiré. L’objet, preuve des moyens de taré mis en place pour sa sortie, s’écoule en cassette audio à 20 exemplaires numérotés. Pire que U2! Bref, scandaleux. Heureusement Carnival of guns, à l’électro psyché agitée aux reflets post-punk exotiques, te transforme d’emblée en pantin désarticulé. Il groove comme personne, j’en oublierais presque la soif d’argent pétrie de honte de Coeur sur Toi. Fructose Father, de son électro art rock disco sauvage, nous trousse ensuite un Founded by twins indéfinissable, mais diablement ensorcelant. Sa basse chaloupe, ses voix flottent et avec tout ça, on n’a plus qu’à osciller du bassin alors que la psyché dérive. Yeah boi (feat. Oscar Mic), dans un rock fissuré/trituré du plus bel effet, voit l’invité chanter comme un gars d’la funk. Ca marche gavé bien, ça lance du riff flouté addictif. Et comme d’hab, ça groove de bâtard.
On est bien partis mon Titi, la folie est aux manettes et l’inventivité lui sert de copilote. Break enfumé, noisy, céleste. Syncopes dansantes. Fructose Father fait la diff’ direct, L’affaire la plie (L’Affaire évidemment) en naviguant dans l’espace comme un Spiritualized. Drogué, passé à l’éther, il nous fait quitter la terre. Son second volet s’emballe, sans quitter ses penchants psychotropes. Anything & everything prend le relai, sur des saccades électro entrainantes. Là aussi, on prend la tangente à tous les niveaux. Sonore, musical, en termes d’ambiance aussi. Ca s’emporte comme précédemment, les sons s’acidifient. Putain de trip, qui prend aux tripes et part se percher là-haut. Al mualim (feat. Cassandra Felgueiras) y reste; la basse, à nouveau, y fait tanguer les bodies. Le chant fend le brouillard, des notes funky pointent leur sueur. Fichtre! Hades, sans ligne directrice trop arrêtée non plus -si ce n’est le brio créatif de son géniteur-, pulse dans la lune. J’en veux bien, moi, de cette K7 à 5 balles qui les vaut plus que largement. On est d’ailleurs libre de donner plus mais c’est pas la peine, Coeur sur Toi possède un compte en Suisse. Les guitares s’offrent une embardée déroutante, après ça Unfinished business (feat. Ayres) revêt des touches jazzy bellotes.
Fructose Father, avec son nom à la con mais que j’adore, a alors fini de nous convaincre. Je vais me plonger dans sa discographie mais avant ça, House in the sky (feat. Rokurokubi, ras le bol de ces invités qui assurent!), au déroulé spatial que l’organe lyrique de la conviée nappe joliment, m’aura offert une avant-dernière salve retenue, grinçante et majestueuse, d’obédience trip-hop empreinte de fougue. Lunatic moon, qui me fait penser tout à la fois à General Elektriks et aux Beastie Boys instrus auxquels on ne peut résister, balançant pour finir huit minutes no-genre, fines et insoumises, qui finalement postent un boucan de tous les diables. Dame Musique s’y perdrait, Fructose Father prend d’ailleurs un malin plaisir à nous emmener dans des contrées éloignées pour, au final, mieux nous séduire afin de nous tendre sa besace, déjà méchamment garnie, où iront se perdre ces pièces jaunes et marrons qui encombrent nos bourses d’auditeurs de zik pas faite pour le fric.