Les revoilà! Guilhem Meier, bruiteur fleuve et batteur pieuvre chez PoiL, PinioL, uKanDanZ et LFant + Jessica Martin Maresco, les cordes bien roulées aux quatre coins de langue chez Le Grand Sbam, Saddam Webcam, et tout dernièrement EZ3kiel. Qui, avec l’apport de Stéphane Piot (enregistrement, mixage) et R3my boy (master), gèrent respectivement et dans un joyeux foutoir voix plus guitare, pour le premier nommé, et voix, tom basse, bidon d’huile, batterie préparée pour sa collègue de délire. Avec Love everywhere, les ressortissants de chez Dur et Doux claquent à nouveau le dawa, matent vers Deerhoof, bruitent façon Sonic Youth et greffent à leur zébrures pas mal de mélodie et de sensibilité (Conveyor belt et ses voix adoucies). La méthode a du bon, elle a déjà cartonné sur Pink noise, en octobre 2017. Love everywhere la réédite, c’est un effet une forme de Pink noise qui nous tombe sur le coin de l’oreille. Rain napalm ne tient pas en place, il se retient dans un rythme tout de même appuyé avant de cracher sa bile. C’est noisy, riffant, syncopé, uni dans les chants qui dévient dans l’alliance. Ca groove avec puissance, on se rappelle alors que le rappel des « sources » décelables ça et là est entièrement superflu. Pili Coït s’escrime, en effet, à cimenter sa propre bâtisse. Il fait le fou, l’est peut-être vraiment, mais retombe sur ses notes en dépit de quelques échappées bien tarées.
Make my papillae blushing, entre contrepoint des voix et délicatesse agitée du décor, s’en tire et pas pour le pire. On n’aspire guère, chez ces deux-là, à faire dans la mièvrerie. On malmène les mélodies, on les fait reluire aussi et parfois en même temps. On flirte avec la pop, on roule des galoches au bruit pur. On retombe du perchoir, le temps d’accalmies de toute beauté. Un sans-faute, mais avec ratures -celles que Pili Coït s’autorise, plutôt des aspérités en fait-, voilà ce qu’est leur Love everywhere. Dur et Doux, à l’image de la structure lyonnaise qui se charge de le sortir. Disowner se lance tranquillou, il cherche sûrement à nous berner. Bon, il reste doucereux. Dans les chants, dans ses textures et sa retenue. Ca réussit au clan, incontestablement. Après Hidden People, il est évident que le label nommé plus haut pourra bientôt se targuer d’avoir édité ce disque sans règles réductrices. Un skeud au joli tissu, que parfois des sons stridents découpent. Un effort travaillé, qui n’a pas besoin d’empiler les titres pour imposer ses qualités.
En effet, on en dénombre sept, pas plus, et c’est marre. Pili Coït se retire, l’acte est posé. Mais avant ça la deuxième partie de son disque, où sonne un I can’t scream nacré et narratif, en confirme la personnalité. De plus en plus élégant, pop parfois, mais pas trop, attention!, Love everywhere adore, aussi, partir en c+++++++. C’est le cas, avec un style certain et dépaysant, quand arrive Taïra no tomo Momoriga et ses vocaux qui font les cons du genre le Singe Blanc. J’en oublie de dire que la pochette de l’album, en plus, est très réussie. Et ce n’est pas parce que….bon enfin si, un peu tout de même. Bref, passons; l’écoute me rappelle. Pili Coït réussit tout, use de tons variés, vibre et prend des virages très secs. On le suit, en s’accrochant au siège. On fend le bitume, on dérape à l’envi, on met des coups de volant sans trop prévenir le passager. On est secoué, un peu groggy, au moment de boucler le trajet. Ca fait pas d’ mal, c’est même carrément revigorant.
Photos Judith Saurel.
Endless make love everywhere se doit donc de bien finir, ça ferait tâche. Alors il séduit, dans sa dualité vocale. Il avance dans une finesse mastoc, un brin remuante quand même. On n’en est pas à sa faire sage, c’est plutôt dans l’insoumission qu’on se montre le plus crédible. Sur le final, les syncopes griffues persistent. Il est conseillé d’y revenir, à ce Love everywhere, sous peine de ne pas en goûter toute la saveur. Dense et exigeant, il incite à l’immersion, à l’attention, et regorge de détails d’importance. A vos casques messieurs-dames, vous m’en direz des nouvelles après vous être gavés de ritournelles à la Pili Coït, forcément en décalage poussé avec ce que l’on peut attendre d’une formation rangée et obéissante.