Initialement paru en 1988 -logique-, le 1988 de Garbage Collector, combo Lorrain (Longwy) fleurant bon l’usine en friche, se voit réédité par Replica Nova. Agrémenté d’une démo, nommée Rocksuckers démo, il impulse en tout et pour tout quinze titres qui ferraillent et dissonent, que le très Deity Guns, et éponyme, Garbage Collector lance en bruissant allègrement. Noise, il se fait court et efficient. Own mind, -tiens donc!, on dirait, un peu, les Davy Jones Locker de Thionville-, le relaie de manière plus cadencée. Le son, sans fioritures, est près de l’os. Les chants, rageurs ou plus sucrés, semblent émerger avec peine d’un fatras sonore délectable. Bloodsuckers, tout en rafales, éructe. Ici, les pavés enragés se font suite et l’ensemble, compact, n’endure pas la moindre contestation qualitative. Je pense aussi à Well Spotted, auteur à l’époque d’un Shine your mind de valeur similaire, pour l’impact des morceaux. Youth group, groovy, plus clair, aborde une facette plus « pop ». Pop façon Garbage Collector, donc sale et noisy. En ces temps-là, en France, nous regorgions de cliques estimables. Celle-ci en est; elle est mue, de plus, par une attitude indé cimentée à ses notes. Film story, de par sa basse charnue, son rythme sec, fait mouche à son tour. La voix, pour le coup, est féminine. Ca amène, on n’en doutait fort peu, un plus audible. L’organe masculin la rejoint, braillé. Du tout bon, du millésimé, passé au filtre Garbage Collector.
Dans la foulée Tiny killer, aux guitares jouissives, fait sa douce dans la souillure. Chant sucré, aux airs de riot girl apaisée, et zébrures guitaristiques font le job. Au gré d’une expérimentation qui ne perd personne en chemin, 1988 s’impose encore à ce jour, en 2021 donc. C’est le pouvoir des disques marquants, que le temps n’érode pas. Before dawn, littéralement hurlé, suinte la rage. Vocale, sonore, sur lit de sons bruts. Du hardcore, chaotique, qui pourtant fait osciller de par sa rythmique qui serpente. Du chant en Français s’invite, on touche là à l’excellence et il nous reste, encore, plusieurs troussées mémorables à se mettre dans les fouilles. Public enemy (Yo! Bum rush the show, ok je sors…), qui précède…Intro, allez comprendre, s’appuie sur l’alliage des vocaux pour, comme le reste, satisfaire nos attentes. De son crade, de vérité. On attaque alors, suite à l’ Intro nommée plus haut, lancinante et syncopée, dotée de voix à nouveau déviantes, la cohorte des démos. De ce point de vue Garbage Collector, déjà fiable, ne s’est visiblement pas foutu de la gueule du monde.
Si ce sont, effectivement, six titres tirés de l’album qui sont présentés, on se situe pour le coup, délibérément, dans des sphères exploratrices sans concessions aucune. Le plaisir n’en est que plus vif encore, j’ai parfois l’impression d’entendre un Sonic Youth « early days », Bästard, ou encore les groupes estampillés Amphetamine Reptile. A l’écart de toute mode, toutefois, Garbage Collector trace sa route, entièrement sienne. Ses démos sont audibles, bien que sacrément crues. A la hauteur des morceaux « finis », elles complètement merveilleusement un disque qui, dans son vinyle mauve et gris-noir, en jette sévère. Elles injectent, pour finir, une diversité de tons, d’orientations, qui font de l’objet un must foutrement précieux, à placer juste à côté de la ressortie du Scorpio Violente.