En 2009 Ben (BLOODYGRAVE) et Frasco (Die LUST!) ont fondé un duo synthwave-punk nourri de leurs différences, appelé en toute simplicité Bloodygrave & Die Lust! Quelques sorties minimalistes, où la langue natale des deux complices apporte du relief, s’ensuivirent. Sur Young and Cold Records, très fiable structure allemande, sort en ce mois de mai une compilation des 10 premières années de la formation, à laquelle s’ajoute l’album Minimal times. Vingt-deux délires addictifs au compteur, souvent secoués et remuants, que des claviers affolés viennent régulièrement balafrer. Ben prend les textes et les « lead vocals », Frasco la rythmique et les arrangements, efficaces et sans manières. Rattengift (2021 version), pour lancer le tout, laisse ses synthés broder, sa cadence sèche et dénudée porter une amorce déjà attirante. Schnee in der Küche fait, un peu, son Suicide berlinois et si la série de morceaux ne varie guère, elle nous impose à chaque tentative des sons bifurquants, une forme de folie sonore et vocale, qui font qu’on reste au contact.
Le fond peut s’aérer, se faire plus « serein » (Planet) voire aérien: la qualité persiste, le côté linéaire -quoique- des chansons devient, pratiquement, un atout. Il affirme et entérine, en tout cas, l’effet des compositions. Tscher no Bill (2021 Version) rafale, Minimalerei avance dans la brume. Ses voix émergent difficilement, comme venues de loin. Puis elles s’affirment, ensuite Supernova souffle une électro-cold bien loin de dénoter. Les travaux de la paire sont de plus dansables, entrainants. Ein weiteres Jahr (2021 version) fait entendre des sifflements, dont le penchant joyeux se frotte aux accents gutturaux de l’allemand dans le chant. Alarmstufe Rot groove, syncope, évoque certaines boucles du Pretty hate machine de Nine Inch Nails. Celle de Down in it, plus précisément. Ca n’est pas pour nous déplaire, bien au contraire.
Plus loin Roboter Liebe, soutenu, laisse la part belle aux volutes de synthés. Dans ce domaine, Bloodygrave & Die Lust! fait preuve d’imagination. On est à la croisée, souvent, de trames folâtres et de temps plus sombres. L’alliance est pertinente; Warum, entre autres et de belle manière, valide mon observation. Qu’il trace ou opte pour une atmosphère plus mélodieuse, le projet tient la route. Il en va de même sur le reste, à savoir dix plages que Warum et ses lignes quasiment EBM, ou le percutant Tscher-no-Bill déjà mentionné ici, entre autres, créditent. Imités en cela par Ein weiteres Jahr, ses claviers à la B 52’s, et le terminal Eindruck S qui, pour clore l’affaire, visite des contrées moins « gesticulantes », clairement célestes. Young and Cold Records, le label d’ Augsburg, ajoute ainsi à son catalogue une union valable, dans une mouvance synth illustrée en l’occurrence par une brouetté de morceaux sans frime ni surenchère, d’une attractivité qui plus est durable.