En poussant le tour d’horizon chez Crazysane, le label berlinois, on tombe entre autres sur Yagow. Un trio space-rock issu de Saarbrück, où Marc Schönwald (Drums, Percussion), Kai Peifer (Bass) et Jan Werner (Vocals, Guitars, Drones) produisent un boucan à la Black Angels, au sein duquel noise, stoner et psychédélisme fricotent allègrement. The mess est le deuxième long jet du trio, celui-ci y est épaulé par Bram van Zuijlen (Synthesizer, Organ, Saloon Piano). On salue, sans tarder, la valeur des morceaux qui, de voix presque sages en temps de planerie bien sonique, en d’autres recoins modérée (Doomed to fail), touche la cible et assure un impact continuel. Le titre éponyme, un tantinet mystique sur son amorce, assaille avec prestance. Un équilibre est trouvé entre puissance et relative légèreté, qui élève le débat et fait qu’on ne fuit pas, loin de là, le contenu proposé. Ce dernier se fait, régulièrement, bruitiste. On ne s’ennuie pas, la qualité est récurrente. Rise and shine, en troisième position, renforce les fondations du disque en faisant filtrer un psychédélisme rythmé, au fond sauvagement mélodique.
L’intervention de Bram van Zuijlen, caractérisée par des instruments inédits, est aussi à saluer. Elle colore, avec efficience et sans le dénaturer, The mess. Quand arrive Bloom, on en est à la moitié du parcours. On en redemande, ledit titre séduit d’ailleurs par son côté aérien, lancinant, qui complète le paysage sonore de Yagow. Sa paisibilité troublée, son lent déploiement le distinguent indéniablement. Sur son terme, il entre en crue. Tout, sur l’album, est ajusté, bien dosé, perché entre force et abords sages. Tres Calaveras, lui aussi lourd mais aussi saccadé, ne vacille aucunement. De manière fréquente, on note le choix de sons marquants, bien imaginés. Yagow, au carrefour de plusieurs genres, trouve son style. Ses influences sont bien assimilées, perceptibles, certes, par instants. Mais elles ne jurent jamais. Les Allemands construisent, avec adresse, leur propre terrain sonore. Eclectic Electric, alerte, venteux, s’y implante sans dénoter. Il monte en intensité, se débride, se jonche de sons notables.
Après lui et pour boucler le trip, Getting Through – is this where the magic happens? approche les dix minutes de durée. Il débute sur une batterie rapide, conserve des atours célestes. Fuzz, kraut par moments, c’est un peu le morceau de bravoure de Yagow. On y trouve, dans l’harmonie totale, les diverses mouvances dont le groupe fait usage. A sa sauce, bien entendu. Après un passage fougueux le morceau breake, puis prend fin. Nul besoin d’en faire plus: Yagow, à l’instar de Zement ou encore Entropy, fait honneur à Crazysane Records et continue à tenir le cap, fort de sept morceaux solides et bien campés.