Parisien, Liquid Bear réunit Kostia Yordanoff – Chant, Basse; Ilya Franciosi – Guitares, Choeurs; Gaspard Kremer – Claviers et Adrien Rouyer – Batterie, Choeurs. D’horizons musicaux différents, ces quatre-là tentent depuis 2018 d’installer leur univers propre, moucheté de prog’ et teinté de reflets 70’s à l’attaque massive et puissante. Heavy grounds est le second EP du clan des quatre, il fuse et fuzze, désoriente parfois quand ses montées prog’ et structures sophistiquées -les deux vont de pair, me direz-vous- posent leurs bases, mais s’impose à l’issue d’écoutes destinées à l’ingurgiter. Après Unwind donc, premier jet dont je ne connais rien, on embarque pour un brassage osé, schizophrène dans le sens où sans prévenir, on peut y passer de plans aériens à des décharges bien senties. C’est Goblin crusher qui, à partir d’un début climatique, appuie ensuite ses assauts. La planance est intense, rageuse, ornée au clavier et dopée à la guitare bavarde dont les sons « d’antan » bordent un premier morceau réussi. Entre explosivité ancrée dans l’ actuel/passé, trouées mélodiques et désir de se démarquer, Liquid Bear parvient à convaincre. Son amorce, en tous les cas, le crédite.
On reste donc dans la course; The frog castagne d’entrée, batterie furieuse et grattes surexcitées au premier plan. Bien 70’s mais « de maintenant », voilà une composition endiablée, qui m’enthousiasme car elle refuse comme le reste de se laisser épingler. Messieurs les chasseurs d’étiquettes, passez votre chemin: Liquid Bear échappe à votre contrôle. Il mêle cavalcades et célestitude, voit ses vocaux rager pour ensuite s’envoler. Waiting to burst, leste et percutant, riffe cru et vole haut. J’étais à deux doigts, lors de mes écoutes initiales, de décrocher. Quelques thés et cafés plus tard, j’ai saisi. Ce n’est peut-être pas ma mouvance de prédilection, mais le rendu surnage et son individualité lui apporte de la crédibilité. L’EP est bon de bout en bout, il « perdra » peut-être certains auditeurs potentiels -complexité oblige- mais possède le pouvoir d’en rallier un certain nombre. En devenir, Liquid Bear parait avoir trouvé la voie. La sienne, bien entendu.
En ce sens, Billions of crabs constitue une vignette sonore de choix. Sa finesse offensive, ses zébrures déchirées et encarts de six-cordes un tantinet sirupeuses, en d’autres coins plus franches, en font un titre accompli. A l’issue c’est Heavy ground, aux riffs introductifs dynamite, qui s’emploie à alterner le lourd et le « nuageux ». Il tangue, dangereusement, de l’un à l’autre. De façon globale, il est ajusté et penche côté puissance sans trop presser, par conséquent, le champignon prog’. Ses volutes de claviers saupoudrent le tout, suivis de déflagrations elles-mêmes doublées de trouées plus « démonstratives ». Tout ça se tient bien, au final l’ep en présence permettra à ses pères de poursuivre, à leur avantage, la mise en place d’un répertoire dont personne ne pourra réellement leur contester la légitimité.