Plus d’une heure et demi d’opposition sonique au virus Macron et à ses intentions, qui cette fois visent à imposer le projet de loi « relatif à la sécurité globale” n°3452, en totale opposition avec les principes démocratiques sur lequel repose la France, et par ailleurs condamné par l’ONU. Un recueil de sons tordus, inventifs et à l’écart des modes, signé Atomic Bongos qui compte en ses rangs une kyrielle de projets hors-cadre. Ca se prend, ça s’acquiert même, quand on sait que l’intégralité des fonds levés par la compilation/pétition sonore ira soutenir les manifestations sous la forme d’ impressions de tracts ou de dons aux associations. Et puis dans le son, c’est juste trop bon, ouvert bien sûr, et ce dès le Sans police de Vincent Epplay, première pièce angoissante qui sonne comme si autour de nous la menace guettait, prête à nous fondre sur le rable. La question est posée: Refuser toute forme de contrainte. N’accepter ni dieu ni maitre. Mais les hommes sont-ils aujourd’hui suffisamment libres pour vivre sans contraintes, sans lois, sans police? On part, déjà, sur des bases de réflexion élevées. Crash Normal délivre Memory Of The Walls qui ajoute ensuite à l’intérêt sonique de l’objet, suivant une trame rude et lente, bardée de sons tranchants et de voix bancales. On divague, stylistiquement, avec allégresse. Le Club Des Chats, avec Bourdon, joue une électro frétillante, aux motifs répétés et chants d’enfant. A nouveau du bon, tout droit sorti du rayon des inqualifiables. Hartouch, avec son black métal indusoïde, en remet une couche bien épaisse, gutturale et concluante.
De chacune des compositions gicle le refus, la colère face à des pratiques basses et de crasse. Franz Hospiz & Andrea Lou Salomon s’appuie sur son Sag Mir Wo Die Blumen Sind, ses saccades électro-noise pachydermiques en Allemand, pour rager et clasher. Côte d’Opale, avec Pink Dot, fend le ciel sur plus de dix minutes barrées. Laurence Wasser signe une Marche arrière dont l’intitulé symbolise bien les actes gouvernementaux et sonne Tom Waits, en bruitiste et fracassé telle une touche de folie salvatrice dans un avenir flouté (elle était facile celle-là…). David Fenech, avec Watch Moving Brigades, place une touche jazzy évidemment déviante; Carton Sonore sert un Dansonance qui sonne paisiblement, on en oublierait presque qu’autour de nous c’est la foire. Carlos Groënland paraphe Poursuite, cold et vivace, aux synthés joueurs et sonorités balafrées.
Toutes ces créations, combinées, illustrent un désir d’ailleurs. Musical, sociétal aussi. On s’évade, à leur écoute, tout en tendant le majeur à ceux qui, sans sourciller, assaillent nos libertés. Delacave, d’un Us Or Dust froid et syncopé, au chant sensible, optimise à son tour la copie. Dress Rehearsals, armé d’un Le Cheval Bascule grésillant, nappé de chants tarés occasionnels, prend également la tangente. C74 riffe sur Personal Or Private, réitératif, vocalement frappé. Et frappant. Holiday Inn offre Feel Free, d’un post-punk cold et lunaire véritablement jouissif, brut aussi. Table finalise Course, étrange (c’est une distinction) morceau aux voix venues de loin, brumeux et expérimental. Eau de source, avec Les poussins, se rend « coupable » d’une synth-pop géniale.
En plus de dénoncer, de faire barrage, Projet in/securite globale: NIET empile les chansons croustillantes, folichonnes, d’une scène tapie dans l’ombre et malgré ça clairvoyante. Sathönay– Domicilio dei vinti et son free jazz dépaysant l’honorent, élargissent par leur son l’étendue de la contestation. Les chants viennent d’ailleurs, ça fait du bien de quitter ses bases tout en continuant à sortir des sentiers battus. Battu, ici, personne ne se résout à l’être et Temper le prouve avec The Chase, électro et virevoltant, au chant mélodieux un brin crooner. Fenshu enchaine, son Lacrymo évoque l’assaut des hommes casqués et les coups portés par ces derniers. Bronzy Mc Dada et Les Anarchistes lance des gimmicks fous, des textes lucides. Une fois de plus, on dévie ingénieusement. Le verbe est juste.
On touche à ce moment à la fin de l’action, significative. Mark Cunningham se fend d’un CoRoNa SW11 au jazz sauvage et hagard, AYaTo propose une Resistance aux tambours puissants et guitares guerrières, un peu comme Ifriqiyya Électrique. De quoi résister avec une force décuplée. Par le son, par la différence. Par le courroux. Miroir Fumant et Chaque Soir assénant, à coups de mots amers et décors acidulés, une dernière salve à la portée conséquente. Le tour est joué, un nouveau support solidissime s’ajoute au panel des moyens de résistance actuellement existants. Faites-en bon usage: au delà de ses nombreuses qualités en termes de « zik », Projet in/securite globale: NIET encouragera et affirmera nos propensions à nous insurger.