Britannique, Billy Nomates conteste, à la Sleaford Mods -dans une certaine et réduite mesure- dont elle est d’ailleurs parfois rapprochée. Elle use d’une formule quasi-similaire, minimale bien que plus « étayée », et base son album, éponyme, sur le « non! ». La formule, le genre sont indéfinissables et c’est ce qui fait le charme de l’effort; Modern hart débute, mélodieux comme un The XX, dégraissé aussi, porté par une basse déjà en évidence et des motifs discrets mais notables. C’est avec Hippy elite, plus vif, haché, que le propos s’emporte. Là aussi, motifs de choix et fond minimal font l’ossature du rendu. Le chant est, étonnamment, peu vindicatif. Tout au moins dans sa tonalité car textuellement, le mot est affirmé. Happy misery voit la dame déblatérer, je pense parfois à Tristesse Contemporaine pour le contenu. Billy Nomates, soit Tor Maries, trace pourtant sa propre route, évoquant au passage telle ou telle formation sans pour autant lui être redevable. No, néanmoins, rappelle les deux lascars de Manchester dans sa vivacité, son duo basse-boite à rythmes alerte et sans graisse. Mais le chant diffère, ombragé, batailleur mais moins rageur. Et de marque. Jusqu’alors, le résultat surnage, aisément, et explique le buzz autour de l’artiste.
On note, forcément remarquée, l’apparition de Jason Williamson sur Supermarket sweep. Un titre aérien, à la Battant, que le débit hip-hop typique du bonhomme vient souligner. On relève, dans le même temps, la plus grande diversité d’un registre certes moins frontal que chez les deux bonshommes à la tchatche incessante. FNP, avec des synthés glacés, emprunte pourtant la voie rapide. C’est un hymne, à relever, à l’attention des « Forgotten Normal People ». Billy Nomates a su attirer l’attention de Geoff Barrow, boss d’ Invada Records et membre des captivants Beak. Ou, « accessoirement », de Portishead. Des guitares éparses, elles aussi décisives, animent l’album. Mudslinger, vaguement 80’s, sec dans sa cadence, plutôt R n’ B dans le chant, ne dépareille pas. Call in sick voit les vocaux rager, on a toujours en étayage des boucles attractives. Ca suffit à honorer le tout, rarement faiblissant. Sur ce Call in sick, des choeurs soul surviennent. L’opus, malgré un certain penchant à l’assemblage des genres, ne sonne aucunement forcé.
Fat white man marie traits rock un brin bluesy et débit plus « club », avec un certain succès. Tor Maries assure là chant, guitare, basse et synthés. On est dans du DIY assumé, à ceci près queRich Leicester l’ épaule à la basse sur quatre morceaux, tandis que Bill Maries joue de la batterie sur trois d’entre eux. Wild arena, paré de motifs encore une fois bien choisis, fait dans le dansant un peu jazzy, feutré et obscur. Bien que sans excès, le panel est ouvert. Escape artist, pour finir en pulsant, fait serpenter sa basse, laisse son rythme galoper. Invada Records, reconnu pour ça, nous dévoile une nouvelle musicienne notable, au répertoire doté de sens et individuel. Celle-ci trône sans faillir aux côtés de The KVB, Blanck Mass, Warren Ellis ou encore Beak, donc, avec dans sa besace un premier jet probant. On lui souhaite par conséquent une suite de même teneur, sans nul doute quant à ses capacités à en assurer la bonne tenue.