Enfanté au beau milieu des ennuis de santé et bouleversements personnels, conçu dans le dispersement, le premier Slow Pulp, Moveys, a tout d’un joli cadeau du groupe…à lui-même en même temps qu’au public, qui découvrira avec ses dix titres de pop-rock indé d’obédience 90’s un panel hautement qualifié, quoiqu’un peu trop poli globalement. Si le début est plutôt tranquille, New horse sonnant comme une pièce folk jouée devant nos yeux, lo-fi et à nu, l’écorce se fait ensuite plus râpeuse. C’est du pur indé que nous livre le quatuor de Chicago, Trade it donne l’impression, lui, de Breeders qui aurait atténué leur électricité. Chant féminin et guitare bâtissent une belle trame, rêveuse. Cette dernière s’anime sous l’impulsion de motifs discrets, dream-pop, et d’une batterie effacée. Site à cela on tutoie le shoegaze au moment où se présente Idaho. La douceur des début commence à se hérisser, la voix d’Emily Massey demeure, toutefois, chatoyante. Au bout de ce trio introductif, on remarque d’emblée la qualité des titres consécutifs aux tourments inhérents à la genèse de Moveys. Il semblerait que les épreuves, loin de disloquer le groupe, l’aient transcendé.
Ainsi Track, pesant et électrique, signifie t-il la poursuite, estimable, de la lente montée en puissance de l’opus. S’il n’inclut encore aucune brèche réellement rock, débridée, il est incontestablement bien troussé, positionné dans une rêverie tantôt langoureuse, tantôt plus « agitée ». C’est At it again, noisy-pop/shoegaze, qui finit par amener à Moveys ce surplus d’âpreté rock qui lui donne du corps et le valorise plus encore. Channel 2, lui, se fait dreamy mais les guitares le lézardent amicalement…ou offensivement, c’est selon. Il y a un réel attrait à l’écoute de Moveys, dont aucun morceau n’engage à passer directement à la suite.
Whispers (in the outfield) revient, dans la minute qui suit, à du posé, dans un format instrumental. A mon sens dispensable bien que doté de sens, très certainement, pour le groupe (il s’avère être reposant, ressourçant), il déroule le tapis pour Falling apart, découpé dans une pop délicate. Et valeureuse, en dépit d’une énergie rock qui, finalement, se fait assez éparse au sein de l’album. Comme chez Blonde Redhead lorsqu’il descend de son perchoir noisy, on reste crédible même adouci. Montana le confirme, il conserve ce charme dream-pop sobre, aérien. Dommage, tout de même, que les guitares ne se fassent que rarement plus méchantes; dans ce cadre-là, elles ont aussi du chien. Movey, ludique, terminant en jouant avec le jazz, sur un rythme hip-hop, et en déviant à la DEUS pour un résultat surprenant, plaisant, en tout cas, à entendre. Sa brièveté, cependant, l’empêche de complètement convaincre.
Il n’en reste pas moins que Moveys, empreint à l’évidence d’une torpeur dreamy liée aux événements traversés, est un disque sans réels défauts. Il lui manque, tout juste, un brin d’allant rock, d’envolées plus rageuses, pour l’amener plus haut que le rang honorable auquel ses chansons l’ont amené. On l’écoutera donc avec plaisir, en ouvrage indé louable, dans la vaine attente d’éruptions guitaristiques existantes, certes, mais qu’on aurait attendues plus fréquentes.