LANE, on ne les présente déjà plus. Les angevins, on le sait, tiennent largement des Thugs et ça s’entend superbement. Ils ont chopé au passage des gaillards de Daria, histoire de solidifier plus encore l’édifice sonore qui, d’emblée, a raflé les suffrages avec un premier EP révélateur puis un premier album qui aura mouillé les yeux et excité les sens de plus d’un amateur de rock tranchant, mélodique et impétueux. Mais aujourd’hui, LANE est un groupe entièrement démarqué. S’il colporte, magiquement, la magie Thugs, il défriche ses propres champs sonores. Quelle meilleure preuve, pour en attester, que ce disque majeur très au dessus de la mêlée?
Dans la puissance, dans l’attrait poppisant aussi, Pictures of a century développe un panel large, personnel, que Michel Toledo (là encore, on s’entoure de la crème de l’indé) enregistre magistralement à Carpentras, sur une des mythiques consoles EMI analogiques. J’ai d’ailleurs le regard tourné, à la minute où j’écris ces lignes, vers le merveilleux Flickering de Robin Hoods qui siège sur mon étagère. C’est l’un des faits d’armes du bonhomme, il en existe toute un bateau et ici, il aide LANE à pousser son identité plus loin encore, autrement dit à s’accomplir de façon définitive. Le rendu, que je cours le risque d’écouter compulsivement, est impulsé par l’incendiaire Discovery none. La batterie galope, Eric narre sa vision du monde, lucide. Le rock est pénétrant, porté par une énergie que personne ne peut endiguer. Les guitares, remontées, partent au front. On est sur de l’échevelé, Voices suit une voie qui diffère peu. Cadence dense, feuillage punk-rock, écorce pop et riffs tout en griffes se donnent le change. So many loves sème l’amour. De la pop qui file, du rock juteux, de la mélodie qui émeut. L’emblématique Vicious Circle a signé, en label au flair qui ne date pas d’hier, le groupe. Ce dernier le lui rend bien, Electric thrills délaisse le brut jouissif pour des contrées plus tempérées. Dans cet exercice, toujours soutenu, LANE ne concède rien en qualité.
Homicide, guerrier et enlevé, va droit au but. Il tue (pardon).Life as a sentence, sur ce ton saccadé mais impétueux, bruisse et gronde. L’orage, chez LANE, se tapit dans l’ombre. Il guette, survient, prend des formes diverses. Sing to the last, lancé dans une course effrénée, confirme l’impression générée par l’album: LANE, plus « étendu », privilégie toutefois l’option directe, qu’il nuance quand cela lui chante. En plus de ça, l’objet est magnifique. Family life, de sa robe pop aux motifs noisy, valide et composte le billet LANE, parti sur des rails qu’il quitte à l’occasion, sous le joug de sa déjante sonique, pour ensuite se tempérer dans la magnificence. Black gloves, sans mettre de gants, d’un post-punk offensif, vient à bout de toute forme d’incertitude quant à la fiabilité de son entreprise. Ce n’est pas du solide, pour le coup, que LANE érige. C’est de l’indestructible. Le ciment mélodique de Last generation, qui breake judicieusement, imparable, m’y amène et je le clame: ce disque, c’est du haut de gamme. L’adversaire n’a plus qu’à réviser…ses gammes; le clan mayennais lui porte là un coup fatal. Qu’il se rassure, It’s only love.
Photo François Poulain
Le titre en question, modéré, renvoie pourtant une intensité/subtilité de taille. Mais LANE aime trop, qui le déplorera, nous rentrer dedans. Lollipop and candy cane, puissantissime, s’en charge et sonne la charge. Still hungry, LANE dépasse nos espérances. S’il apprécie le frontal, il signe pourtant une terminaison modérée qui, dans l’intervalle entre sensibilité et piquant sonique, accroîtra notre dépendance à ses treize chansons millésimées. On en rêvait, on y croyait, certain des aptitudes de LANE. Celui-ci l’a fait. il s’apprête de ce fait à enterrer la concurrence, contrainte de retourner à ses chères études dans l’hypothétique espoir de lui damer un jour le pion.