Défricheur chez Super Apes, Vania De Bie-Vernet expérimente, de façon fréquente et productive. Ce qui a pour effet de générer des instrumentaux multi-genres, lesquels brossent un panel partant de l’électro pour arriver à l’afro-beat en passant par des plages dub et exotiques (MentOGM, dépaysant et acidulé). Sur Flashbulb memory, qui n’est pas même son dernier disque en date puisque qu’existe, depuis le 8 avril, un certain Platformer performer, on a droit à la BO, plutôt enjouée, de la survenue des beaux jours. Météorologiquement parlant bien entendu. 14 pièces ludiques, à commencer par l’éponyme Flashbulb memory à l’électro vive, étranges et créatifs, auxquels ne manque que…le chant, en forment le puzzle.
En effet, une voix étofferait, à mon sens, et renforcerait, une collection valeureuse et décalée qui, de par son format « tout instru », peut en arriver à faire fuir les moins persévérants. En aguerri, on restera toutefois dans l’écoute, bien au fait de la capacité du bonhomme à nous attraper. Mais tout de même; un organe vocal, même disséminé, ferait son effet. Le pupillomètre, lui aussi hybride et inconnu stylistiquement (électro-dub peut-être? peu importe finalement), ou encore Wired for society (on remarque, sur le disque, nombre de sons de basse bien dansants, décisifs), funky, concourent à ce que, lors de l’écoute, on reconnaisse la patte de l’artiste. Les claviers ondulent, les sons fusent, légers et enlevés. Voilà un registre surprenant, exigeant également, qu’il importe d’assimiler.
Dès lors, on prend un plaisir certain à le rejouer. Chordata, par exemple, spatial et futuriste, un brin jazzy, suscite le trip. Destiné à l’esprit, un peu, aussi, aux gambettes, Flashbulb memory se décale et emballe. Bromponie, sombre, d’un funk chercheur, crée à son tour des sensations marquantes. Pluriel dans ce à quoi il s’adonne (design et photographie sont partie intégrante de son univers), Vania De Bie-Vernet joue, déjoue car dévie, et invente un son qu’on ne peut qualifier de commun.
Qui va me rembourser mes adieux, s’enquiert t-il. Ne nous quitte donc pas, lui répond t-on. Tes trames allègent l’esprit, nous emmènent dans des sphères inexplorées. En cela, ton ouvrage nous est cher. Le dit titre, alerte, ressemble à une envolée dans les étoiles. A la fois perturbé et accueillant, le monde de Vania recèle aussi sa part d’ombre. Laatlammetjie Dance, syncopé, consolide un fin d’album de haute volée. On en exceptera les quelques intermèdes, dispensables. On suivra, happé, les changements de directions imposés ça et là. On est, pour le coup, pas ménagé; de passages appuyés, on peut subitement s’égarer dans un recoin sobre, épuré. A son terme, il n’est pas exclu que l’envol reprenne. C’est ce qui fait la spécificité de l’opus. Sa force aussi, quand on en a pris la mesure.
Megacorp Melancolia, tentative céleste animée, pose son clair-obscur. Entre sons inventifs et climats singuliers, De Bie-Vernet continue à se distinguer. Je répète qu’un chant, qu’il émane de lui-même ou de « guests », constituerait un plus perceptible. Ceci étant dit, l’écoute fréquemment consentie dévoile des instants bénéfiques, conclus par Low fantasy. Un ultime essai d’un dub d’ailleurs et de nulle part, à l’image de tout ce qui est entrepris sur Flashbulb memory. Ce dernier vaut, par sa facilité à dérouter, beaucoup. Immersif, c’est un album à réserver, cela va de soi, à une frange d’habitués aux oreilles ouvertes, adeptes de l’innovation et dos résolument tourné aux productions prévisibles.