Un trio français confirmé (Decibelles, affublé d’un nom de groupe prémonitoire), un duo de londoniennes déchaînées qu’épaule un solide batteur (Nova Twins, récente révélation à la fusion bondissante), telle était l’affiche proposée par la Lune des Pirates en ce mercredi pluvieux, amorcé par 3 concerts…à la faculté d’arts de la ville, avec à la clé 3 formations valeureuses, qui plus est dans 3 registres différents et jamais « attendus ». Comme quoi il est bon de flâner, en passionné, dans les lieux où le son se fait polisson. Mais revenons, pour conclure cette belle journée, à la « Lune » qui une fois de plus, par cet enchaînement alléchant, sut convaincre le public de braver le crachin local. Il faut préciser, en ce sens, qu’avec une ouverture signée Decibelles, nous fumes rudement et délicieusement secoués. Le trio lyonnais (c’est déjà bon signe) de « pop noisy et énervée », dès ses premières notes, fait trembler la baraque à grand renfort de secousses noise. Expérimentés (scènes à foison, 3 ep et 2 albums au compteur), Sabrina, Fanny et Guillaume jouent fort, compact, et nous servent un Rock Français fumant, tout droit sorti d’une marmite qui turbine comme aux plus grandes heures. Ils y glissent des petites ritournelles sucrées, sans non plus trop s’adoucir, et cognent sans discontinuer ou presque.
Arc-bouté sur ses instruments, Decibelles met une conviction conséquente dans son jeu. Courtes sont les pauses, le flux est nourri et continu. Textuellement, on rentre aussi, un peu, dans la tronche. La scène est pour ce groupe un exutoire, parfaitement investi. On prend dans la trogne, et de front, un bel assaut rock. Energie punk, textes pas très éloignés du dit genre, ruades noise et nappage pop font monter la sauce, épicée. En 45 minutes de set, on est déjà heureux d’être venu. C’est du rock, direct, furieux. Du vrai, pas celui du Zénith. Ici c’est la Lune, on a à vrai dire décollé depuis un moment déjà, sous l’impulsion de ces 3 fauteurs de troubles soniques.
Le temps d’échanger quelques mots avec une paire du coin elle aussi valeureuse (Manopolo), les Nova Twins descendent le mythique escalier de la Lune. On le pressent, ça va là aussi déboîter. On ne croit pas si bien dire. Le combo, look coloré très en vue, convoque l’impact enragé d’un RATM, le groove d’un Skunk Anansie, et balance allègrement une fusion qu’étayent des plans vocaux à la…Rihanna. Georgia South et sa basse aux grondements puissants, Amy Love et son chant « dance » ou plus sauvage, ses guitares bourrues s’affichent en duo imparable, la frappe retentissante du « collègue » charpentant le tout sans trembler. Engagé dans le mot et tout autant dans le son, mordant à souhait, Nova Twins « from London » invente un patchwork inédit, dont il nous abreuve ce soir jusqu’à l’ivresse, générée par 2 tigresses vouées à la cause…de l’ouverture. D’esprit, musicale aussi, forcément. Avec une telle tornade, qui brasse large du point des genres inclus, il ne saurait en être autrement. On l’attendait, ce groupe révélation. Il répond présent, fait de plus preuve de bonne humeur et fait pogoter, sous forme de jeu, l’assistance amienoise.
Il est en effet vain, face à un live aussi torride, de rester de marbre. Vortex t’envoie dans les cordes, sorte de r’n’b punk féroce et acéré. Les gimmicks accrocheurs se font entendre, en nombre. Taxi riffe, comme nombre d’autres compositions, durement. Devil’s face ravage tout sur son passage. C’est de l’explosif, le bien nommé Bullet (in your head?) impose son groove rap-fusion, ses incrustes funky, pour valider le live bluffant d’Anglaises ayant de plus l’avantage, stylistiquement, de complètement détonner. Dans sa sauvagerie ondulante et créative, Nova Twins n’est semblable à quiconque. Ca l’honore et ça nous revigore, l’attaque d’un Lose your head nous ferait en effet perdre la tête. De galops wild en plages issues d’une frange, comme dit plus haut, d’obédience « dance » ci parfaitement intégrée, un équilibre, parfait, est atteint. Nous autres, spectateurs, sommes comblés. On en a pour notre blé, il va sans dire que cela nous plaît. Au plus haut point.
Il est déjà l’heure de s’en retourner. Peu importe, nul besoin de jouer 2h pour régaler son auditoire. Nova Twins, en formation émergente d’ores et déjà validée, est voué à retourner les salles. On en a eu la primeur, ce soir; ce n’est pas rien et gageons que les dates à venir, dont une dizaine en France, marqueront au fer rouge fusion les foules du jour.
Photos William Dumont.