Questions à une jeune artiste qui, armée d’un « debut EP » récent et représentatif, prend vie en même temps que ce dernier….
1) Bonjour Lou, tout d’abord cette appellation de Cloud, d’où provient-elle ? Serait-elle représentative d’un Nuage ayant singulièrement « obscurci » ton quotidien durant un temps?
Salut Muzzart ! Complètement, c’est vraiment représentatif de la période dans laquelle est née le projet à l’époque de ma dépression où j’avais ce qu’on appelle en anglais une « clouded vision » (= vision obscurcie). Ca vient de là, du fait que ça contienne mon prénom qui est Lou et ça fait aussi référence à ma franchise de jeux vidéos préférée, Final Fantasy, qui inclut un personnage nommé Cloud Strife. C’est une mélange de tout ça.
2) Tu parviens visiblement à te faire connaître par le biais d’internet, te sens-tu désormais prête à « affronter » le monde et la scène ?
Plus que jamais ! J’ai fait un peu de scène quand j’étais adolescente entre les fêtes de la musique et un bar de quartier et ça me manque beaucoup. Je suis super excitée de préparer tout ça avec mon équipe. J’ai aussi très envie de rencontrer des gens et de pouvoir échanger avec eux autour de mes créations.
3) Ton premier EP, ce Sick Sad Girl à la fois lumineux et ombrageux, semble constituer pour toi le passage à un état nouveau, j’ai la sensation d’y entendre soniquement quelqu’un qui « mue » et trouve devant lui la lumière qui le fuyait jusque alors. Tu confirmes ?
C’est très joliment dit et très juste. Ma santé mentale m’a paralysée pendant des années et à travers la création de cet EP j’ai pu me redéfinir en dehors de la maladie et grâce à la musique. Sick Sad Girl marque vraiment la fin de ce long voyage dans l’obscurité et c’était aussi un bon exercice pour construire une base de ce qui est « mon son ».
4) Que t’a apporté le fait de composer seule, « dans ton coin », en postant sur le net et en effectuant des livestreams ?
Toute cette période m’a permis de faire de l’introspection en profondeur et je crois qu’aujourd’hui avec le rythme de vie qu’on nous impose ça devient très compliqué pour tout le monde de le faire. Même si cette période était douloureuse je crois vraiment que ça a été un chance incroyable pour moi, et dans un deuxième temps ça m’a permis d’appréhender le regard des autres de manière progressive et douce. Ca m’a aussi permis de comprendre que la musique casse vraiment les barrières des frontières et du langage!
5) L’écriture est de toute évidence, pour toi, cathartique et salvatrice. Comment t’y prends-tu ?
Contrairement à la production où j’ai collaboré avec un ami, pour l’écriture j’ai vraiment besoin d’être seule, d’écouter la mélodie en boucle et de me replonger dans le sentiment qui a initialement inspiré la création. Et après je creuse et je commence par faire une sorte d’écriture automatique sans me demander si ça terminera dans la chanson ou pas. Eloigner l’auto jugement le plus possible et après je fais le tri et je mets plus en forme ce qui est venu naturellement. J’essaye de faire en sorte que ça soit le plus authentique possible, le plus fidèle possible à ce que j’ai vécu et ressenti.
6) Pour en revenir à Sick sad girl, à la fois pur et tourmenté, le rendu est-uniquement du à toi, Lou, ou as-tu été épaulée dans sa création ? Qu’en attends-tu, maintenant que l’objet tant attendu prend vie ?
J’ai d’abord tout composé, écrit et produit seule, et j’ai ensuite ramené ça à Mehdi Major qui m’a aidé à grossir les productions. Par contre Sinking, je l’ai écrite seule mais on l’a composée ensemble, c’est venu assez naturellement. J’ai l’espoir secret qu’il aide certaines personnes qui traversent ce que j’ai pu vivre, que ça leur donne l’espoir d’un après, parce qu’à l’époque l’idée même d’un lendemain me paraissait impossible.
7) J’écoute l’EP d’une oreille nouvelle depuis que j’en connais l’origine profonde, ce qui accrédite le fait que le vécu, quand bien même il s’avère traumatique, « transcende » l’auteur et offre à l’auditeur une perspective différente, qui l’incite à s’impliquer et modifie sa perception du contenu. Qu’en penses-tu ?
Je trouve ça magique. Sans en connaître l’origine, le projet peut-être apprécié et compris complètement hors de mon vécu. Si l’auditeur est curieux et qu’il tombe sur son explication de nouvelles nuances s’ajoutent et creusent de nouveaux sillons émotionnels. C’est comme ça avec toutes les oeuvres et l’art en général et l’empathie ne fait qu’augmenter notre expérience des choses. Magique et profondément humain.
8) D’où viennent tes éventuelles influences, s’agissant de ton EP ? As-tu des « modèles « ou préfères-tu oeuvrer en solo total, à l’exclusion de tout apport extérieur ?
Je pense qu’il est impossible de ne pas avoir d’apports extérieurs, on est tous l’addition de millions de choses auxquelles on est exposés. Mais comme c’était mon premier projet, je ne me suis pas mise de barrières et j’ai fait ce qui m’est venu naturellement. Après personnellement j’écoute beaucoup de pop, de hip hop et r’n’b, dont la scène Coréenne qui tire beaucoup du jazz et ça j’adore.