Ceannais, Bavoir bave et bavasse, il tabasse aussi, il ironise. Il dénonce, avec virulence. Ce Bavoir éponyme est son premier album, sorti sur Atypeek car loin d’être typique, et Bavoir y provoque un joli foutoir. Ses pensées, ici, débordent, non jugulées. De fait Le boxeur, qui baisse le rideau d’un argumentaire agité, bastonne et dévie. Dans le contenu, on se plait à ne pas se soucier de plaire; on prend un malin plaisir, en véritable « artiste », à brouiller les pistes. L’insipide de nos jours prend une belle beigne, noise, rock, spoken-word aussi, assénée avec autant de déviance que de poésie réaliste. Chanson et rock fusionnant (je pense, plusieurs fois, à Le Singe Blanc) se donnent le change, en phase dans les chemins de traverse qui jalonnent le disque.
Hugo GRUEL : Batterie, Guillaume HARDY : Basse, Maxime METAIS : Guitare et Bubu PAGIER : Chant, unissent leurs êtres, leurs visions et leurs compétences musicales au service d’un rock jamais prévisible, mais dont les balles verbales et musicales atteignent la cible. Indé, groovy (L’immergence, clippé, dont le côté braillé convoque dans ma caboche malmenée le souvenir de la scène indé-alternative de chez nous), à d’autres moments détendu en apparence, fin avant de complètement dérailler (Assieds-toi donc), le registre de Bavoir appelle à la mentalisation tout en semant la confusion. A la réflexion. Sur soi, sur l’entre-soi, sur le sens, sur le décent. Assieds-toi donc, Bavoir a à te parler. Un peu math, un peu littéraire aussi, il passe ses mots à la moulinette d’une musique virulente.
Good for you jette un hardcore-fusion imparable, celui-ci est « Good for us ». Bavoir ne se définit pas, il crache ses idées, les confronte jusqu’à ce que chaos s’ensuive. Il les braille (Blood n’ heart), use de voix qui ont perdu la voix. Ce faisant, il gagne des voix; les nôtres. Quand il s’apaise (Sourire bleu), il transpire, encore, le brio et dégage une p+++++ d’identité. Mais Mister M, cinglant, réinjecte une folie inspirée, et débridée, dans la mixture du groupe. Bavoir, ce soir, s’invite à la foire, dans laquelle il met un grand coup de manche. Pendant ce temps l’auditeur se déhanche, affolé par un son au groove possédé.
Ils prétendent même, ceux-là, que le Punk is dead. Vu la teneur, ça m’étonnerait. Bref et taillé dans une couenne punk au relents funky délirants, le morceau envoie tout valser. Comme un punk en somme. Pour finir, le quatuor normand joue un Action-baiser-gifle longue durée, qui monte en puissance jusqu’à installer un rock alerte, noise, dont le verbe mérite encore une fois d’être disséqué. Il faudra, pour cela et pour saisir de façon accomplie la portée textuelle de Bavoir, une série d’écoutes poussées. Ca tombe bien; en guise d’ouverture à leur Release-party, prévue à Caen (LABA) ce samedi 21 décembre, la clique nous laisse dix titres forts, volubiles et sans limites, qui mis bout à bout génèrent un rendu dont on ne peut contester la farouche qualité.