Déjà de retour, en 2016, avec un nouvel album de bonne facture, qui mettait fin à un silence -trop à notre goût- prolongé, honorés entre autres par Noir Désir et Dominic Sonic sur des opus majeurs, Les Nus rennais confirment, avec Enfer et paradis, un come-back qu’on sera nombreux, dans la caste rock, à approuver. D’autant plus qu’à l’écoute, le contenu convainc et ne s’avère pas vain, mélodique qu’il est mais dans la qualité, parfois plus nerveux (un performant, j’ai d’ailleurs, à la base, écrit perforant, Suspicion). D’obédience plutôt 70’s, sincère -il ne pouvait en être autrement avec le combo de Christian Dargelos-, le disque transpire tout à la fois élégance et atours rock louables. C’est d’emblée le cas, sur Les ravages du temps où mélopées pop et nerf rock se télescopent pour engendrer une amorce qui fait ses preuves. On est déjà sur la bonne voie, l’éponyme L’enfer et le paradis valide d’ailleurs l’impression favorable laissée par les bretons. On est d’ailleurs, ici, entre gens de la région puisque c’est Romain Baousson, ex-batteur des Bikini Machine, qui a peaufiné l’ensemble en prenant place aux manettes.
S’il s’avère mélodieux, Enfer et paradis contient son lot de tensions, telle celle qui enveloppe Dans la maison d’Eva. Il est orné avec soin et sobriété, caresse les sens (Corpus christi) avant de s’envoler de manière appréciable. Vous faites du rock n’est-ce pas? , qui suit, est nuancé, bluesy, bien mis mais aussi, en ses bases arrières, un tantinet sombre. L’impact réside d’une part dans ce juste dosage, et d’autre part dans le verbe de Christian Dargelos, à l’unisson avec ses fidèles hommes de main.
On poursuit l’exploration, sans renâcler, et le rock griffu-soigné de Ceci n’est qu’une nuit retentit. Sans faire dans l’innovant, Les Nus honorent leur créneau et attestent d’un savoir-faire rock sur lequel le temps n’aura pas fait de ravages. Signe, réjouissant, des temps. Sur dix titres, aucun ne pourra être « ciblé ». Tout juste pourra t-on regretter le côté un peu trop épars des ruades électriques. Les Nus lui préfèrent parfois, et avec aplomb, la patine pop (Café bizarre). Celle-ci met en exergue la plume du leader et trouve dans l’ornement de ses collègues l’écrin adapté. Enfer et paradis, un peu comme si au beau milieu de la débâcle de notre ère, il y avait, et c’est le cas, de l’extase à vivre.
Qualitatif donc, le disque donne l’espoir d’une suite prolongée, de lives enflammés où le groupe, désormais muni d’un répertoire étendu et sans faiblesses, s’offrira le luxe de botter l’arrière-train de tous. Le terrain, et le terreau, est favorable. On n’attend à vrai dire que ça, le Stade Rennais aussi, Daho tout autant et le grand Dominic, de passage à la guitare au moment du retour des Nus, pas moins. Vous n’avez plus le choix Messieurs, il y a là toute la matière nécessaire à vous imposer, tout ce qu’il faut pour, à nouveau et dans l’unité d’un clan rock intergénérationnel, faire résonner les notes d’une musique authentique et au discours juste et lucide.