Label « à deux têtes » mené par Jocelyn Soler, inlassable défricheur sonore et cogneur de choix, et Pascal Sanson, directeur artistique ayant également créé Bon Temps Magazine, Bon Temps a pour but d’allier electro et art contemporain. Le partage fait aussi partie intégrante des objectifs de la structure et après le très bon premier EP de Verlatour, voilà que les amienois nous régalent d’une première compil’, pour laquelle des noms qu’on retiendra, et qu’on retient déjà, sont sollicités.
En huit titres, en effet, artistes « du cru », pointures nationales et musiciens plus « lointains » cohabitent harmonieusement et sans plus attendre, on se trémousse sur le Marydroïd de Janski Beeeats, aux gimmicks funky, en son début, décisifs, pour ensuite installer une electro qui use à l’envi de sons, ça sera une constante sur cette compil’, obsédants. Il n’y a là aucune surcharge inutile, aucune redondance dans les atmosphères ou dans le rythme (on évite ainsi l’écueil prédommageable et inhérent aux genres mis ici en avant), et Museum enfonce le clou d’une musique dansante mais pensée, obscure, souterraine mais malgré cela accessible à tout initié, avec son Woken up by beasts. On est frappé par la variation entre élans underground, donc, et nappes bien plus célestes, la justesse des breaks et le côté fédérateur, « qui met tout l’monde d’accord », des morceaux choisis. Verlatour et son Génération arrive d’ailleurs dans la foulée, on y incruste du chant -bien vu, je me répète avec plaisir ayant déjà formulé cet avis à propos d’autres sorties du genre- et encore une fois, l’inventivité domine. Nullement étonnant s’agissant du bonhomme, mais réjouissant, ce dernier nous bombardant de sonorités à la croisées des styles qui illustrent par ailleurs bien l’esprit de Bon Temps.
On « affronte » alors Plaisirs et son Plaisirs honteux, haut perché, ombrageux et pourtant traversé de traits de lumière issus du cosmos qu’il traverse, aux cadences changeantes dans la plus grande pertinence. Pertinence que Kenny Ruby, bassiste pour le moins accompli et musicien tout terrain, affirme sur son Jupiter control saccadé, animé par des sons qui se télescopent jusqu’à dessiner une trame fine, mélodieuse et agitée, du plus bel effet, au chant…bienvenu et attrayant bien qu’épars.
De nature à convertir à deux styles ici majoritaires « mais pas que », techno et electro, Bon temps #1 poursuit son avancée avec Emma de Sèze, qui livre un Wild at heart dont les motifs bien sentis, la « grisaille » générale et les sons triturés forcent la décision. On se tient vainement à l’affût du faux-pas, on est bienheureux de retrouver un autre local, Vadim Vernay, le temps d’un Puppets & aliens dark qui m’évoque -le rapprochement est évidemment flatteur- l’étrangeté géniale du Mess des Liars, avec ces mêmes voix barrées de même que ce climat dérangé, juste entièrement addictif.
On peut alors conclure au son de Frau Silberficher et de son Sad postcard dépouillé, nuageux, en terminaison apaisée d’un recueil bluffant dont la Release party est prévue à L’International le 19 de ce mois, lives à l’appui. Le lancement étant lui programmé dans notre bonne ville amienoise, où contrairement à ce que disent les pleurnicheurs il y a à faire, ce jeudi 5 mars au Café.