Déjà la seizième édition pour ce Rock en Stock chéri des Nordistes -et des autres-, avec pour mot d’ordre l’ouverture et un kaléidoscope musical qui fera son effet, intronisant la bagatelle de vingt groupes en deux jours. Bien que le public ait boudé, venu en partie et de toute évidence en priorité -dommage!- pour les têtes d’affiche, les superbes prestations, entre autres, des Von Pariahs ou de Cheveu.
Von Pariah
Von Pariah
En dépit de ça et après une ouverture vigoureuse signée des locaux à souhait In Chtis Fada, punk-rock « frenchy » de rigueur, l’occasion nous fut offerte de passer une première journée captivante, bien que trop « festive » à mon sens dans sa programmation. Ce que le public plébiscitera pourtant, avec au passage Täg et ses dispensables mais toujours sympathiques reprises, les bien nommés Atmospheres et leur bel équilibre entre plans heavy et climats mélodieux, Youth Club et son rock dansant et entraînant.
Car c’est aussi ça Rock en Stock; mettre en avant des formations peu connues mais hautement méritoires, et on s’en prendra « plein la face » en ce samedi d’allégresse, Sorah poursuivant sur une touche funky dépaysante, ou en mode blues-rock de nature à élargir encore le spectre musical livré. Bien amorcé, Rock en Stock allait à nouveau ravir son public, de façon claire et manifeste avec HK et les Saltimbanks, au registre éprouvé, pratiqué depuis des lustres, mais doté en tout cas d’une capacité à fédérer qui engendrera un temps fort incontestable, et d’une largesse musicale bienvenue, avant les surprenants et détonants Born to Brass, sorte de fanfare métal devant laquelle on ne peut rester de marbre, grimée et percutante. Bel « intermède » donc, pour ensuite laisser place à La Rue Ketanou, second gros succès public du jour malgré, une fois encore, un carnet de route « chanson » pouvant lasser.
HK et les Saltimbanks
HK et les Saltimbanks
Qu’importe, l’assistance danse, n’en rate pas une miette et crie son bonheur. La Rue Ket’, comme disent certains, rafle la mise sans aucun écueil. Le trio faisant montre, à l’instar d’HK, d’une aptitude avérée à rassembler. Et à mettre en liesse, et en mouvement, comme le feront les Brassen’s Not Dead qui s’appuient sur les compos du défunt chanteur en leur administrant une bonne dose de punk-rock, sans omettre d’animer leurs morceaux par le biais de leur « animateur à la kon ». La conclusion de ce début de nuit revenant dans la foulée à Boris Viande, venu lui de Dinan, ville pour le moins festive. Un goût de Balkans se dégage de ses essais, « trompettisés », bonne idée, ledit instrument se greffant à son DJaying ainsi ingénieusement étoffé.
Le temps d’une courte nuit, d’un aller-retour Etaples-Amiens (mention bien également, au passage, à la Sanef pour le trajet « droit devant ») et voilà que les excellents Ukulele Boboys et leur cohorte de covers de haute volée, au ukulele bien sûr mais joué, souvent, avec vigueur, engendrent un réveil des plus avenants, sur la petite scène installée au milieu du village public et assos. « Emergement » matinal que l’amienois, justement, Thomas Albert Francisco intensifiera sur la grande scène avec son folk rude et de grande classe, joué seul et avec l’apport de boucles judicieuses. Première ovation du dimanche pour le méritoire musicien samarien, entièrement justifiée. Ladite journée s’avérant ensuite excellente, avec l’enchaînement Teacup Monster (rock groovy et bien joué)/Mary has a gun, d’Aix en Provence, avec ses compos à la sauce New Found Glory. Et après ça, LA découverte, aux dires d’une flopée de spectateurs, du festival: le Dirty South Crew aka DSC, septet amienois à la fusion ravageuse sur scène comme sur disque. La clique « fraîchement » débarquée du sud, dont Bayonne, Orthez ou Brétignolles pour des dates choc, subjuguant la foule par son énergie imprenable, sa prestance scénique de folie et la valeur d’un carnet de scène devenu inattaquable. Une prestation de qualité supérieure, dans la communion totale avec un public qui tient d’ores et déjà en l’occurrence sa trouvaille du week-end, et en prend pour son argent et même bien plus. Chapeau bas messieurs-dames, votre ouragan nous a mis sur le flanc, même moi qui ai pourtant l’habitude de vos venues sur les planches et aurais pu penser que ça commençait à « ronronner » un peu trop. Il n’en est rien et j’avoue, encore une fois, me retrouver soufflé par la prestance des ressortissants de l’ex-Samarobrive.
Dagoba
Dagoba
On passe alors de la fusion au métal, avec les performants Dagoba, pour lesquels c’était ma -très convaincante- première, les marseillais assénant une raclée sonique jouissive aux Etaplois du jour ou de toujours, dévastés par l’impact sonique de ce gang plus que rodé. Brut mais pourtant nuancé quand il le faut, et très bon, la qualité ne variant pas d’un iota avec Cheveu, qui sera donc boudé par un public préférant se restaurer et/ou user du houblon plutôt que de profiter de l’electro-punk barré et millésimé, singulier, du trio issu de chez Born Bad. Peu importe, David Lemoine et ses acolytes font le boulot, le font même avec brio et nous réjouissent de leurs Quatro staggioni et autres Madame Pompidou. Excellent, comme le seront les Von Pariahs, au rock tendu teinté de cold-wave et de shoegaze, emmenés par le charismatique Sam Sprent. Devant un parterre encore clairsemé, qui bizarrement se remobilisera pour le très prévisible Ky-mani Marley, les nantais font mieux qu’assurer et signent l’un des lives les plus en vue, les plus probants, sauvage aussi, de ce Rock en Stock. Dans la lignée de leur probant Hidden tensions, qui se prête fort bien à la scène.
Le fils de qui vous savez, au reggae heureusement assez éclectique, émaillé de reprises de son pater qui bien évidemment feront mouche, suscitant ensuite la félicité d’une foule qui aurait bien fait de rester mobilisée l’instant d’avant, sans « zapper » des groupes autrement plus surprenants tels ceux cités plus haut.
Il n’empêche, Ky-Mani Marley fait un carton, coolitude et rythmes typiques aidant, « acidifiés » par quelques pointes plus rugueuses et servies par le groove d’une rythmique souple. Ca se trémousse, ça chante à qui mieux-mieux et pour conclure, Weeding Dub n’a plus qu’à balancer son…dub aux reflets reggae et electro qui me fera croiser, sur le départ, bon nombre de sympathisants de son univers se hâtant de revenir danser sur ses sonorités un brin rébarbatives.
Peu importe, ce Rock en Stock 2014 aura très largement assumé son rôle: mêler découvertes et confirmations, permettre la survenue de groupes émergents de qualité. Et rassembler, humainement comme musicalement. Dans une pluralité appréciable, avec en lien des animations comme le blind-test ou l’hilarant concours de glisse sur houblon.
Photos William Dumont.