Sur la route pour célébrer High Priestess, dernier joyau en date, Sarah McCoy répond aux questions de Will Dum….
Comment t’es-tu lancée dans la musique, et pourquoi plus particulièrement le piano?
Mes parents avaient un ami qui bossait pour les fêtes foraines, sur la Côte Est. Il a voyagé énormément entre le Maryland et la Floride, avec mes parents nous habitions un point central entre les deux. Il restait donc souvent avec nous pour quelques jours. C’ était une sorte d’homme magique pour moi en tant qu’enfant, parce qu’il arrivait avec du vent et partait sans un mot avec toutes ses couettes pliées le matin. C’est lui qui a remarqué que je chantais en permanence des petites mélodies inventées à mes doudous, et qui a relevé mon intérêt pour la musique. Il a offert à mes parents le piano de sa femme, un Wurlitzer, ce qui a été le début de toute mon histoire avec cet instrument.
Est-ce un support à des émotions particulières ?
Le piano peut supporter toutes les émotions, c’est unique. À l’adolescence, mon envie était d’apprendre la guitare électrique pour exprimer des émotions plutôt agressives. Mais maintenant, je suis extrêmement contente d’avoir la grande diversité du piano au bout des doigts.
Tu en es à deux albums ; quel est ton regard, à ce moment-ci de ton parcours, sur ce dernier ?
Enfin, je suis fière. Ça a été énormément de travail d’auto-production, mais aussi de production en live. J’ai eu besoin de me battre énormément pour son existence. Mais, après un peu plus de deux ans de tournée avec cet album, je vois son évolution. Ce sont mes deux musiciens, Jeff Hallam et Antoine Kerninon, qui ont donné à ‘High Priestess‘ ses ailes pour les performances en live. Être impliquée dans les quatre grandes démarches de l’album – la création, la production, la performance et le partage – permet effectivement de vivre pleinement l’album. C’est précieux.
Le plus récent des deux, High Priestess, sonne très jazz, soul aussi -et pas seulement- mais « enfiévré », comme habité. La musique te sert t-elle d’exutoire ?
Je ne suis pas sûre d’être d’accord sur le fait que ‘High Priestess‘ possède des éléments très jazz. Mais le but, c’était de retenir les racines de mon trajet musical avec une grosse évolution vers le monde électro-prod. Si un(e) musicien(ne) répond « non » à la deuxième partie de votre question, je me suicide.
En 2016 tu as joué à Amiens, ma ville, pour le compte du Festiv’Art. Te souviens-tu de cette date ? La découverte de ton registre, pour beaucoup de monde, fut ce jour-là une bien belle surprise !
Je m’en souviens très bien! J’ai des photos de ce jour quelque part (ce sont peut-être les miennes, Sarah!), j’avais les cheveux courts et bleus. C’était aussi le premier concert que j’ai fait avec mon sound designer/ingénieur, Guillaume Loubere, pendant qu’il portait sa ‘Pencil moustache’ (moustache en trait de crayon) qui ressemblait à celle de John Waters. Ça fait 9 ans, maintenant, qu’on a bossé ensemble.
Tu reviens d’ailleurs au Cirque d’Amiens en juin 2025, soit 9 ans après ta première venue. A quoi peut-on s’attendre en termes de contenu ?
Tout d’abord, j’ai énormément amélioré mon niveau en français depuis 2016, afin de créer un lien avec le public entre les chansons qui est un moment si intense. Avec Antoine et Jeff, on a créé des éléments de basse et de batterie qui ‘drivent et booment’ en supportant la puissance et la tendresse de chaque morceau. Nos efforts se sont concentrés sur le fait de maintenir l’univers lié à ce que j’écris, tout en y ajoutant une explosion massive de son.
Quant à moi, je n’ai pas trop changé, je suis qui je suis. Folle et puissante 🙂
La configuration des lieux où tu te produits a-t-elle une influence sur la nature de ton jeu ?
Parfois la configuration a son rôle. Par exemple, le Théâtre de la Mer à Sète a sorti le fucking Godzilla en moi (un de mes meilleurs souvenirs de 2024). Quand c’est comme ca, c’est impossible de ne pas sentir l’électricité du moment. Mais, pour moi, c’est une connexion avec le public qui change le trajet du concert. Il y a parfois des publics froids, et parfois, lorsqu’on s’y attend le moins, le public se révèle bien fou et fun.
Tu uses du Français dans certains morceaux, comme La Fenêtre par exemple. D’où te vient l’usage de notre langue ? Que te permet-elle ?
Pour être honnête, « La Fenêtre » est une anomalie. J’avais envie d’essayer, voir ce que ça donnait, mais franchement la puissance de mes paroles en anglais est incomparable. J’ai trouvé une grande restriction en écrivant en français. J’ai une façon de parler, même en anglais, un peu bizarre, qui ne se traduit pas forcément bien dans les paroles françaises.
Malgré mes doutes dans ma poésie française (et l’accent) , « La Fenêtre » était « la porte » (MDR) vers ma belle rencontre avec la directrice Patricia Mazuy et le compositeur cinématique, Amine Bouhafa, qui ont écrit la chanson française que j’ai chantée pour le film « Les prisonniers de Bordeaux. »
Le successeur de High Priestess est-il d’ores et déjà en cours de préparation ?
Après une période de p***** de page blanche, je suis en ce moment même en route vers le studio de Jeff Hallam pour arranger des maquettes avec lui et Antoine (dans le taxi!) 🙂
J’aimerais avoir plus de temps, en dehors de la tournée, pour avoir l’espace nécessaire à la réflexion dont j’ai besoin pour trouver mes mots, mais ça ne se passe pas comme ça cette fois.
Mon premier album, ‘Blood Siren‘, était une compilation des chansons que j’ai écrites sur une longue période, alors que j’étais inconnue et que je jouais dans les bars. Quand est arrivé le moment d’enregistrer l’album, j’avais énormément de choix. ‘High Priestess‘, comme pour beaucoup de musicien(ne)s, a pris forme pendant la longue période de confinement. Je n’avais rien d’autre à faire. Mais celui-là, le troisième à venir, c’est mon enfant en fuite.
Photos: Anoush Abrar