Trio Lyonnais signé chez Bureau B, premier gage de valeur et d’étrangeté, eat-girls s’est rodé au live, de ce fait ses morceaux aussi, avant d’accoucher de ce Area Silenzio perché et bluffant. Dans l’intervalle les deux Dames et leur acolyte ont ouvert pour Thalia Zedek, EXEK et The Young Gods, en résumé, ce qui prouve bien l’étendue de leur registre. On se retrouve, à l’arrivée, avec un first LP que On a Crooked Swing discote dans une flottaison droguée, célestement dub, triturée, qui de suite démarque les rhodaniennes. L’effluve fait son effet, innommable. Des voix songeuses s’y glissent, le tout s’intensifie. Unison, deuxième tirée psyché hallucinée, m’évoque une Kim Gordon dernière ère. Elle est, d’ailleurs, citée comme influence mais eat-girls dégage assez de maîtrise, de tendance à l’errance pour filer son propre coton. Une trouée sonique survient, suivie de notes presque jazzy. Canine, cold et boite à rythmée, se dote d’un Farfisa qui me rappelle les Inspiral Carpets. Le résultat, pas loin de la no-wave, est captivant. Le post-punk rétroïde de A kin également, cold et bruyant par moments, urgent et souillé.
J’élis eat-girls, ces trois maîtres(ses) du loufoque inventif. everything goes in diagonal, s’il dure à peine plus d’une minute, claque une cadence vive et un déroulé venteux, à l’orgue crois-je, carrément prenant. Saint’s Discards vient ensuite duber mais pas seulement, loin s’en faut, et élargir le terrain de jeu de eat-girls. Des scories psyché en spirales se font entendre, le groupe brouille les pistes et c’est pour ça que sans rechigner, on le suit dans ses détours. earthcore dévie et s’entoure de sonorités lunaires. Des percus l’animent, le brassage vaut réellement le détour. Para los Pies Cansados me fait penser, de son côté et sur ses premiers instants, à Frustration pour le déboulonnage cold-électro/punk. Mais de loin car l’issue, chantée en Espagnol et de ce fait dépaysante, n’a rien à voir avec ce que font les autres. Le bouillon là aussi se distingue, truffé de gimmicks qui restent en caboche.
©Côme Rollet Manus
La fin approche, 3 Omens étend une finesse que les boites à rythmes font vivre, de pair avec les chants. Le morceau gagne en ampleur, on en note la maestria sonore. Area Silenzio, pour être saisi, digéré, imposera moults écoutes. Il se termine sur un Trauschaft alerte, cold et noisy, porté par des saccades répétées. Area Silenzio est un OVNI musical riche, un must barré qu’il importe de dompter avant d’en extraire la sève. Le jeu en vaut la chandelle car passé ce cap, se profile l’une des galettes les plus attrayantes de cette fin d’année pourtant riche en sorties diverses et non-normées.