Frédéric D. Oberland (Oiseaux-Tempête): synthé modulaire, buchla, boite à rythmes, sax alto, guitare électrique, voix. Grégory Dargent (H): oud, guitare électrique, synthé analogique, métaux. Tony Elieh (Karkhana): basse électrique, synthé. Wassim Halal (Polyphème): darbuka, bendirs, percussions, effets. Tous quatre diplômés es recherche sonore, ces hommes s’associent dans la création d’une matière libre, cela va de soi, sans contrainte ni restriction. En résulte SIHR, de haut vol, voyageur et passionnant, free-jazz et tellement plus. Oui-Ja’aa nous le montre, on s’en va quêter loin et les sons, sortis d’une imagination elle aussi sans bornes bien qu’en ayant parcouru, emmènent de suite. Dans une valse, du recoin des terres, répétée jusqu’à la transe. Celle-ci est soniquement riche, instrumentalement inédite. Près de dix minutes de totale possession, à la hauteur du génie de ses façonneurs. On y entend stridences, cuivres sous zébrures et dépaysement sans terme. Et pas que ça. Enuma Ellis, de percus en notes qui leur nom ne disent pas, inclassables, sombres et quasiment arabisantes, étend l’échappée. La magie opère, on y perd nos repères et Dame Musique fait fi de ses règles. Dans la lancinance, intense, le morceau nous gagne. YouGotALight, d’une trame jazzy claire mais bancale, à la feutrine superbe, s’emphase sur son second volet. On y reste, au bout du compte, comme suspendu.
A mi-chemin OhmShlag (Quake Tango), électro de dans la nuit, dotée de relents tribaux, fait à son tour merveille. Il bruisse, enfle, fuite des sons tordus. SIHR, après l’initiale écoute, en appellera bien d’autres. Babel Cedex, psyché et oriental, tout à la fois dark et solaire, dépose un entrelac hallucinant. Il hypnotise, quittant une route qui depuis longtemps n’existe plus. Black Powder lui fait suite dans un groove là encore perché, psychotrope. Je ne peux, par le mot, par l’écrit, décrire ce SIHR immersif de bout en bout, dont on ne redescend plus. A l’heure où Quasar in Téleutaî le boucle, livré à des spirales démentes, titubantes, menant à une fin chaotique, y replonger s’impose inéluctablement. Mais déjà la splendeur déjantée du propos, inégalable, contraint tout écoutant un tant soit peu impliqué à chanter les louanges de ce superbe disque, ouvrage de poly-instrumentistes à l’association aussi porteuse que merveilleuse.
Photo Grégory Dargent