Cyril Cyril m’avait déjà capté, positivement, sur son Yallah Mickey Mouse. Avec Le futur ça marche pas et ils ont bien raison -j’ai essayé, je me suis gaufré-, les deux Suisses récidivent. En tout aussi bon, en weirdos géniaux qui invitent grave et collaborent à tous bords. Ils explorent plus loin encore, visitent d’autres contrées comme l’Amérique du Sud, et réalisent un carton sonore groovy. Le Mensonge en ouvre la porte, percus assénées dans le nez. Le banjo dépayse, la trame ici développée n’a pas de nom et c’est entre autres pour ça qu’on affectionne Cyril Yeterian (chant, banjo) et Cyril Bondi (chant, batterie), chercheurs es-genres, qui ont trouvé le leur. Le monde en prend pour son grade, l’instant suivant Microonda Sahara déroute à son tour. Précisons qu’en l’occurrence Eblis Alvarez (chanteur des Meridian Brothers, collègues de tournée) prête sa voix d’ailleurs à ce morceau dont le climat -il s’agit d’ailleurs bien de ça- embarque, un brin dub, carillonnant, aux vocaux en rafales vindicatives. Cyril Cyril constamment se démarque, on le suit sans rechigner dans ses captivantes pérégrinations. Le post-punk agile de La rotation de l’axe, clippé, convie Inès Mouzoune à la basse électrique et aux synthés. Il griffe, impose un rythme presque martial, et fait foi. Et puis c’est tout parce t’façon et sans façons, Cyril Cyril réussit tout.
Alors on danse, projeté loin de nos bases. Les phoenix de l’amour et son indolence fumeuse, flemmarde, un tantinet psyché, exaltée aussi, nous envole et se syncope dans des nappes enivrantes. Musicalement, le patchwork au patchouli de Cyril Cyril, ici souligné par les cuivres free de l’ Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp (soit Gilles Poizat et Benoit GIF Giffard), lâche des effluves durables. Plus rien à faire, recul vers le médiéval, assassine à son tour une ère pue la pisse. Les voix s’y complètent, barrées, au gré de volutes dark aux ruades nourries. Soniquement, on se gave à nouveau. Délice taré, le titre est pitre. Chat Gepetto, mordant, se penche sur la relation entre l’homme et la technologie. Il le fait dans un rock déchainé, racé, où l’émotion, est tuée mais à l’écoute, on en ressent sauf que ce sont celles que la paire de Cyril induit. Pas celle d’un ordi, d’une technologie qui l’être écrase. Je surkiffe. Sapitos Caracas suit, grenouilles en guise d’échappée. Dans l’élan, La grisaille sert un canevas arabisant, électro de là-bas, du plus bel effet. Le futur ça marche pas mais Cyril Cyril, lui, galope vers les sommets.
Photo Léo Marussich
Le Tocsin, où l’héros est nommé, balance sa vivacité. L’alerte est donnée. Il importera de se plonger, ils le valent incontestablement, dans les thèmes qu’aborde la projet. Le futur ça marche pas, éponyme, laisse Violeta Garcia (Blanco Teta) et son violoncelle l’orner, il se balafre et offre une sorte de rock-noise des terres reculées. Folie des grandeurs dans le viseur, la chanson s’affole et régale. Elle aussi. Cyril Cyril est à son zénith, Sweetzerland Bunker Love met fin à son superbe album. La Suisse y est saignée, la démarche prend vie dans un chant tchatcheur et un post-punk serti de sons de toute sortes, entièrement bonnards. Le futur ça marche pas est un must qui optimise notre quotidien, inspiré et dynamique, osé et bien dosé.