Chez Super Apes à Nantes, on ne fait rien comme attendu et quand Peter qui gère la structure m’a annoncé une première collaboration entre Vania De Bie-Vernet et l’auteur Diego Gil, soit l’histoire de Laïka, le premier être vivant à avoir voyagé dans l’espace, je me suis d’abord dit: « Qu’est-ce que c’est que ce bazar? » avant de comprendre qu’une fois encore, la création allait captiver. Laïka est partie à bord du Spoutnik 2, le satellite s’est désintégré dans l’atmosphère le 14 avril 1958 et Super Apes a lui fait le choix, 66 ans après l’événement, de sortir l’ouvrage un 14 avril également. J’en parle le 24, ça n’a rien de volontaire. C’est le temps qu’il m’a fallu pour l’accueillir, le digérer, me laisser happer par son électro nébuleuse et ses trames narratives qui font qu’on s’y croirait. Ca démarre par, et en, 1957. Trame céleste, digne d’un Vania De Bie-Vernet, minimale et de suite planante, agrémentée de petits sons tordus. Om embarque, ce sont ensuite les rues de Moscou qui nous « abritent » et Laïka se voit malmenée. Le mot chope l’attention, l’histoire s’en empare. Le verbe et les sonorités, sur ce volet en trois parties, accompagnent magiquement le déroulé. De passages clairs en recoins dark, de notes qui virevoltent en instants figés, la cassette faite main ne cesse d’attirer. La faim survient, la rue moscovite assure son boulot d’éducatrice. Educ’ de rue, éduc de l’âpre, éduc de la misère. En bon travailleur social, je m’y reconnais.
Cours chienne errante!, clame alors la suite. Nous à l’écoute, on décolle derechef. Pouvoir du son, irréfutable. Effet(s) des textures. Le refuge nous ouvre ses portes, dans un trâlée de notes obscures que les textes épaulent. L’homme est fourbe et Diego Gil le verbalise. Des routes déroute, spatial, psychotrope. Bientôt j’aurai la K7, je la vois bien tournoyer dans mon poste à l’ancienne. Bref des routes, jusqu’à Baikonour. Nouvelle odyssée enchanteresse, à l’aube de l’histoire. J’aurais bien vu, pour souligner tout ça, une BD. Mais la cassette, c’est d’un rétro indépassable. Et l’alliance des deux hommes, à vrai dire, se suffit à elle-même. Baikonour, en parties passionnantes, fait voyager et Laïka en Brave bête se tenir prête. Je retiens mon souffle, dans le même temps je tangue au son du Laboratoire Des Vents Solaires. Continuez donc, messieurs, à œuvrer de concert (et pourquoi ne pas en faire, d’ailleurs). La centrifugeuse pulse, à nouveau de mon côté je m’envole. LAIKA – Un Poème Musical imprime des émotions, Laïka est propulsée. Avec elle nous voulons partir.
Alors Sputnik, sans nous, active L’ Allumage et Laïka s’en va. Le décollage secoue, Laïka pourtant pourfend les cieux. Diego Gil dit son épopée, Révolutions sert une électro ondulante de la meilleure des cuvées. En même temps, depuis belle lurette, on s’est extrait du sol rien qu’à déclencher l’album. Laika s’en va, putain fait chier!! Pardon. Le terme de l’opus la sacre, l’élève bien haut, dans un fuselage de sons « floating in space » et de chants robotisés. On galère à redescendre, suspendu on quête l’animal et ça nous fait mal. On peine à y croire. Il n’en reste pas moins que l’effort commun aux deux artistes, de haut vol et ce n’est pas un jeu de mots ni de maux, nous vire de nos bases et vaut toute l’attention et la considération possible.