Attendu, le deuxième album de Lovataraxx s’intitule Sophomore. Il explore la frontière, ténue, entre le dedans et le dehors, l’action et le repli, l’ouverture à l’autre et la solitude. Le duo lyonnais y fait des prouesses, cold, on s’y attendait, gorgées de synthés aux dessins brumeux, parfois et même souvent virevoltants. HEIDI MONTAUK, après une intro presque « horror movie », dégorge un post-punk aux gimmicks répétés jusqu’à ce qu’on s’y soumette. Sa voix grave, ses fulgurances au bord de l’indus, sa vitesse d’exécution en font la rampe de lancement idéale. Il brise son élan, cette fois le chant féminin apparait. Les deux genres se mêlent, complices depuis toujours. Le rythme se réhausse, les synthés s’ennuagent. TRÄUMEN, aussi appuyé dans sa cadence, convoque l’Allemand. A chaque survenue, la langue fait son effet. Lovataraxx à la jeunesse s’adresse, nul doute que son Sophomore la sortira de sa torpeur. Dansant, vif et inspiré, il prend de la nappe céleste sur HARMONY BOAST, aussi alerte que les deux efforts qui le précèdent. Le synthétique froid et d’obédience 80’s, ça et là, de Lovataraxx, est devenu une marque. De bout en bout, il saisit et fabrique des climats palpitants.
EARL CONDITION, au chant de crooner des ténèbres, joue des nappes, encore, attirantes. En termes de sons, de discours, de timbres, Lovataraxx séduira et personne n’ergotera. Son créneau est fondé, de base sûre. Des cordes font irruption, clôturant le titre. TILDA VAAST envoûte, marqué par une électro instrumentale en son début, ensuite chantée dans une grisaille veloutée que l’organe d’Hélène surligne. Synth, minimal mais dans sa portée maximal, le registre de Lovataraxx le singularise. MILLEPERTUIS renoue avec le leste, drapé dans une obscurité toute en mouvement(s). Il y a de la vie, de la danse, dans ce que joue Lovataraxx. Une rencontre, un aller-vers, une écriture qui tend me semble t-il à pourfendre l’épreuve. Et qui fait ses preuves. ZERRISSEN itou, dans des abords une fois de plus dynamiques et de voix typées, qu’on ne se lasse pas d’entendre. L’espoir n’est pas vain, il vit et s’ébat, se débat dans ce Sophomore hautement abouti.
Le synthé y préside, optimalement utilisé. J’adorais Hébéphrénie, Sophomore s’y substitue avec autant de pouvoir. MARYBONE, chanté en Italien, à moins que ce ne soit de l’Espagnol et je m’avoue pour le coup largué, pose le jeu sans perdre en attrait, loin s’en faut. Même l’artwork, en l’occurrence, suscitera l’adhésion. BRUXISM (FIRE), qui en live clôture les sets de la paire, fait lui aussi l’unanimité. Il file, cold de par ses basses, mais des motifs plus clairs l’ornent. Il trace et reste en tête, c’est le cas de Sophomore dans son entièreté, et expire un refrain qu’on retiendra. L’opus voit le jour chez Cold Transmission, c’est pas rien. MARE qui le borde se syncope et sème des graines cold aux scories spatiales, valorisées une dernière fois par des vagues savamment façonnées. Sophomore se termine là, il se situe dans le haut du panier et comble nos attentes les plus poussées par le don de dix plages modèles que je m’empresserai d’aller célébrer dans ma ville, à la mi-avril, avec les locaux de KaTze en chauffeurs de salle.
Photos Tanguy Guézo