A première écoute, trop rapide, j’ai d’abord -ou presque- fui. Trouvant ce disque d’Ella Ronen (Storyteller/Mother/Feminist/Zürich/Tel Aviv et tout ça me la rend immédiatement intéressante) trop délicat. Il porte un thème attrayant, celui d’une fille née sans peau. C’est en fait sa propre histoire, touchante, poignante, émouvante et la seconde écoute révèle un disque riche, superbement décoré. Les sujets traités sont élevés, un duo feutré et aérien étaye l’opus (I Just Want To See You (feat. Sam Cohen), sur les frontières inhérentes au quotidien, prétendument infranchissables). Truth et ses rythmes effacés, ses légères incartades célestes, inaugure l’ensemble. On dirait, à l’écoute, Elysian Fields. C’est beau, et pétri de vérité puisque celle-ci est en route, souffle une Ella depuis reconstruite. Undercover prend le relais, de parure similairement saisissante. Le panel instrumental est large, il embellit The Girl With No Skin. Howl, paré de guitares qui brièvement griffent, chante l’amour, qu’on peine à faire vivre. Ecouté fort, l’album regorge de tension retenue, de motifs merveilleux. Le morceau s’envole, grinçant dans sa grâce récurrente.
Plus loin Fuck Cute, en s’habillant de sons à la Depeche Mode (si si), séduit lui aussi. Me voilà pris, presque épris. La chanson s’agite, rock, acidulée, et fait valser les assignations féminines. J’adhère. The Girl With No Skin, aux textes à nouveau de marque, s’élague. Il ondule, soumis à la beauté. Presque sans peau, mais pas tout à fait car sa parure l’honore. Ella Ronen, son disque le prouve, trouve sa résilience dans ses activités. Celle-ci, sur dix plages notables, lui redonne corps. Feel It Rising louvoie, jazzy, jusqu’à nos sens. C’est d’ailleurs de ça, peut-être bien, que l’opus est en quête. Le sens. L’alliance chanté citée plus haut vient, à son tour, attraper l’auditeur. A sa suite The Mall, dans un rock offensif, bataille et de la lutte, sort vainqueur. Et Ella, grandie. The Girl With No Skin, typé, personnel jusqu’au terme de ses maux, fait merveille.
Photos Alessandra Leimer
En fin de renaissance Tightrope, d’un coton jazz souple, serpente paisiblement, s’intensifiant ensuite. Animé, il fait montre comme tout le reste d’une superbe vêture. The Girl With No Skin, s’il avait bien débuté, prend fin dans la prestance. Ella Ronen, vraie, sans fard (ni peau), s’illustre et trouve du souffle. Parfois, elle nous le coupe. Rearview, placé au dernier rang, borde posément son œuvre. On note, encore, les sonorités en ornement. Le climat, le mot, la portée du rendu. Fragile, splendide et hérissé, The Girl With No Skin fait ses preuves et conjure l’épreuve, conçu par une artiste au talent audible.