Prévenu à la dernière minute, la veille, par le copain expérimental Wolf City, quelle ne fut pas ma stupeur à l’annonce de l’événement: Brzowski from Portland, de son rap-noise mâtiné de guitares malsaines, de chappes bruitées surplombant son sévère débit, se produit chez Nordine, au Sombrero! Et Marrow, son compagnon de route issu lui de Toronto, ouvre dans un registre proche. Tout ça dans ma ville, ce qui ne m’empêche point de rater la prestation d’un local auquel je présente mes excuses. J’ai pris mon temps, sachant le peu d’empressement avec lequel débutent ces lives. J’ai eu tort, j’ai des remords. A mon arrivée Marrow, déjà, verbalise des trames planantes et remuantes, électro/hip-hop, sombres, inclassables, enrobées de sons au mitan des genres. Je m’offre une Barbar, heureux de lâcher des ronds au tenancier des lieux. Nous sommes peu, nous devrions être en nombre…
Marrow
Marrow gronde, signe une série qu’il assène avec sûreté. C’est presque replié sur sa personne, en talentueux ermite, qu’il officie. Je retombe sur cette fille, croisée au comptoir du Thil il y a fort peu, également présente ce soir. Le monde est petit, malgré mon bonnet enfoncé, ma doudoune Airness soldée à 30% et qui contre efficacement le froid, elle m’a remis. Marrow termine, nos applaudissements ponctuent sa venue. Un stand de merch trône, on y trouve même des cassettes! Seconde Barbar, Nordine met du blanc dans les lights et ça donne de la clarté. Le Sombrero est beau, Marrow pas moins. Brzowski se prépare, pour lui j’ai roulé et garé ma tire près du R.U, où se restaure l’étudiant. Depuis de longues années, l’Américain conçoit une mixture de rap, de grattes sans ouate, de débit éloquent, percutant. Ca soigne son homme. Je gigote, en équilibre incertain mais sans trop vaciller. Le bonhomme fusionne, diversifie les ambiances et dépote une série de salopard. Entre deux morceaux il me lance, à la vue de mon objectif, qu’il me filera son mail. Ca va sans dire, les clichés sont faits pour tourner.
Brzowski
Le moment est parfait, je ne cesse de me trémousser. Je me rappelle, avec jubilation, la vague crossover. Les 90’s. Deuxième Barbar, Nordine est crevé mais merci mec, il est bon de venir cher toi! Brzowski poursuit, partageur. Il débite, amer et lucide. C’est un vrai, un indé. Sa discographie, fournie, parle pour lui. Sa prestation aussi, et pas qu’un peu. Sans bornes mais il en a pourtant parcouru, sa valise posée au sol le démontre, il vit à la seule force de son art. Il s’en gave, nous en abreuve. Son live n’est que bonheur, j’en tire de longues goulées enivrées. A l’issue je lui refile ma carte, lui des stickers qui de ses dires représentent Charles Manson étudiant. J’en ris, je les collerais bien sur mes phares mais privé de lumière, je risque la galère. Je m’en retourne, j’y retournerai et je t’en conjure, Amiens, remets de la vie dans tes immanquables caf’conç’ !!!
Brzowski
Photos Will Dum