C’mon Tigre, d’Italie, a déjà eu mes mots. Son jazz voyageur et chaloupé, pétri au groove, m’avait alors gagné. Avec Habitat, où l’on se sent chez soi, c’est reparti pour un tour. Goodbye Reality sort du coffre cuivres typés, rythme serpentant et touches africaines, tandis que la voix lorgne d’abord vers la soul. Musicalement, c’est du flan coco. Un délice, donc. Le savoir-faire est intact, l’approche largement validée. The Botanist (feat. Seun Kuti), dans un élan semblable, nous dépose plus loin encore. Il funke, sa rythmique ondule et pour la seconde fois, l’écoutant rend les armes. Teen Age Kingdom (feat. Xênia França) se charge de l’attirer, à son tour, entre classe chantée et dextérité dans la juxtaposition des genres et sons. Il existe, réellement, audiblement, une identité C’mon Tigre.
Sixty Four Seasons, racé, souple et subtil, acidulé aussi, la décline sur des traits rock occasionnels. C’mon Tigre, quoiqu’il décide de faire, rafle la mise. Il est libre, aventureux, adroit dans ses choix. Reconnaissable, il ose la différence. Nomad At Home, bien nommé, jazze entre relents cold (la basse) et notes plus claires. Lui aussi tangue, valse, pétille soniquement. Virtuoses mais jamais démonstratifs, les musiciens la jouent collectif. Il dessinent des paysages de merveille, astucieusement brodés. Nomad At Home s’emballe, poussant le trip. Puis Odiame, au chant détourné, étend encore le champ d’action. Moins louvoyant, il valorise la langue de la Grande Botte.
Plus loin Sento Un Morso Dolce (feat. Giovanni Truppi), tribal et/ou exotique, endiable la danse dans une électro remuante et colorée. C’mon Tigre ne se fixe que peu de limites, balafrant ses influences. En a t-il seulement encore? Na Dança Das Flores me répond que non, d’élans vifs en saccades qui déraisonnent. Enfin Keep Watching Me (feat. Arto Lindsay, excusez du peu), de son velours bordé par les guitares et c’est presque tout -en même temps pas besoin de plus-, fragile, free en son terme, met un point final élégant à ce Habitat de brio, melting-pot musical à la hauteur de ses dignes exécutants.