On ne présente plus Camilla Sparksss, qui ne connait pas à intérêt à se magner. D’autant plus qu’ici la Canadienne, en plus d’offrir un vinyle surprenant (voir vidéo ci-dessous), change radicalement de registre. De son champ électro tapageur habituel, elle évolue vers une huitaine de « bedtime stories for adults » qui après assimilation, engendrent la séduction. En résulte Lullabies, où le mellotron est roi et se greffe à des chantés-parlés qui délicieusement « endorment ». My Way My Love, paisible et cuivré avec retenue, donne ainsi une idée de ce l’opus nous réserve. Délicat, enveloppant, il touche au cœur et caresse l’esprit. Suit The imaginary you, ombrageusement orchestral. On se laisser bercer, et pas forcément à l’heure du coucher. Les narrations de la moitié de Peter Kernel, aidée ici et entre autres par son comparse Aris Bassetti, font du bien. Elles le visent, je pense, au détriment d’un quotidien qui tend à s’en défaire.
Ainsi Watch Me, contemplatif justement, de ses climats lumineusement froids, surlignés par l’instrument dominant, fait-il de même. Camilla se réinvente, avec succès et pour la bonne tenue de nos sens. Hanging Around se met à nu, seule la voix -ou presque- vient l’orner. Mais après l’amorce, l’instrumentation entre en scène. Minimale, elle resplendit encore. On s’envole. Temper Temper Mother Nature, majestueux, nous dépose un cran plus haut. Sur sept minutes, il oscille entre jour et crépuscule, suivant l’égrenage des mots. Puis Ode To Those Who Can Touch Their Toes, plus bref, impose de doux coups de semonce. Lullabies est immersif, profondément immersif.
Photos Aris Bassetti/Baiba Bondare
Six Is A Lot, amicalement dreamy, prolonge la torpeur. N’ayez crainte, la zone est sécure bien que sous rêve. Son enrobage est magnifique, on aimerait parfois qu’il ouvre des brèches. What A Day, qui en marque la fin, tout aussi songeur que le reste, drapé de notes superbes, se fait également valoir. Lullabies charme, déroute sans trop heurter, et déploie une collection de « chansons de nuit » à la beauté grisée, assez irrésistibles pour qui se donne la peine de s’en imprégner.