Alliance de deux « vétérans » aux parcours dédiés à la musique chercheuse (Geins’t Naït et Laurent Petitgan), GNLP s’est fendu depuis 2014, et l’apparition de la série Mind Travels instigués par le label Ici d’Ailleurs, de plusieurs sorties où ambient, néo-classique et trames industrielles cohabitent, adroitement mêlées, exigeantes et au final captivantes pour qui s’est donné la peine de s’en immerger. Sur OLA, toute dernière galette en date, collabore Scanner alias Robin Rimbaud, virtuose du sound collage. Lui aussi expérimente; vingt albums sur des labels aussi prestigieux que Sub Rosa ou New electronica ponctuent son parcours, de fait son alliance avec l’équipe déjà en place apparait comme une évidence. L’album qui en émane, décrit comme plus froid que ceux qui ont pu le précéder, s’amorce par un MT 26 sur lequel voix narrative, souillures classiques de niche et climat angoissant se heurtent sans heurts dans une trame à l’orée du figé, à tel point que c’en devient passionnant. Des bribes de rythmes, épars, des chants fantomatiques aussi, animent l’ouverture. On se fait cueillir, d’emblée, par la nouveauté du rendu. BRA, dans une investigation sonore tout aussi poussée, couple bruits indus et pulsations d’obédience vaguement électro. L’ambiance, encore, fait mouche et grince avantageusement tout en prenant des abords spatiaux de par ses vocaux de là-haut. GILLES, où le récit interpelle, lucide, se pare de sons noirs. En phase, dirai-je, avec les phénomènes décrits.
Photo G.Didierjean.
S’il est âpre OLA, qu’on saluera, chopera l’investi. Je l’ai d’abord fui, j’y suis revenu et je m’en félicite. C’est une oeuvre qu’il importe d’aller chercher, 370 nous le prouve: ambient, il laisse filtrer des nappes nuptiales traversées de sonorités rampantes. Des trouées cabaret, magnifiques, illuminent l’ensemble. Puis BED, dans un vacarme percussif insistant, sur chants susurrés/déchirants, produit à son tour un effet marqué. C’est en marge, de toute manière, qu’on déniche la meilleure des matières. OLA, éponyme, s’orchestre les deux pieds dans l’avant-garde. Cadences paresseuses, voix derechef décalées, pourtant attractives et d’un bel apport, le décorent. Ce disque est génial; MOUCHE y volette, y poste textes perchés, notes triturées et flux psyché à en perdre la tête. MORPHENG, à sa suite, impose des mots loquaces, passés au filtre d’un milieu vaporeux.
Issus de deux écoles bien distinctes, dont la collaboration n’était pas de prime abord évidente (la scène industrielle et expérimentale pour Thierry Mérigout (dernier membre en activité du groupe Geins’t Nait), alors que Laurent Petitgand est lui bien connu pour sa musique de film, en particulier pour sa collaboration avec Wim Wenders), les protagonistes principaux enfantent un ouvrage précieux, parachevé par la participation de leur acolyte. En toute fin d’immersion 9.95 MW, à la lente progression jalonnée par un rythme une dernière fois discret autant qu’asséné, consacre le travail des impliqués, à l’oeuvre depuis 30 ans, tout de même. Leur vision, leurs regards croisés leur permettant, ici, de signer un effort collectif à ranger parmi les plus expérimentalement fascinants de ce début d’année.