Rappeur-chanteur issu du Burkina Faso, Art Melody brasse les genres et nous concocte, en collaboration avec le label bordelais Tentacule Records, un Artemisia de haut vol, mis en musique par le beatmaker français Redrum. Soul ou indus, à cuivres détonnants sur gimmicks funky irrésistibles (Zink Drapowan feat.Rudeboy (Urban Dance Squad, et ouais et ça s’entend!), rien ne lui résiste et son inspiration, récurrente, l’emmène dans des contrées originales. Boukma, en pôle position, le démontre sans délai: la mixture est relevée, africanisante, tribale, tripale. Le voyage est amorcé, dans la carlingue Art Melody des territoires novateurs s’offrent à l’auditeur. Ana N’Parata, percutant, mêle électro virevoltante, sons orchestraux et tchatche nourrie sur lit d’incrustes soul chantées. Il faut suivre, le rendu est audacieux mais assurément, il mérite l’effort. Le résultat est dansant, il encense et surprend. Zamaana se pointe, porteur de notes folk de toute beauté. Sans limites, l’album fusionne.
Après ça Lonab, jazzy, enfume le cockpit. Entre énergie ouverte et plans plus lascifs, le ressortissant de Ouagadougou impose sa patte et rien ne rate. Baof Rinda, grinçant, percussif, nous dépose en eaux ondulantes. Difficile à classifier, c’est ce qui fait sa force, Artemisia saute de liane en liane et n’a de cesse de brouiller les pistes. On entend des sonorités singulières qui sans peine, font plaisir aux oreilles. Viima, funk et de débit à nouveau soutenu, acidulé, fait à son tour sensation. Ziindin Taaré suit, cuivré, hip-hop, fédérateur. Mady, ensuite, lâche des volutes brouillardeuses. Les ambiances sont travaillées, les textures captivantes. Wag Kienfô feat. Anny Kassy, également saccadé, couvert d’incartades de cuivres, déracine autant. On aimera, en plus des vertus déjà décelées, la coloration, la musicalité délibérée de cette superbe galette.
Photos Lucas Gurdjian.
Sur la fin Kanou feat. Djeli Faya, folky, insulaire, presque, dans son jeu, maintient un niveau élevé. L’Afrique est en vue, vous l’aurez saisi mais à vrai dire, Art Melody s’étend bien au delà de ses contours. Teng N’Biiga feat. D-Oud La Paix, auquel il incombe de finir, s’appuie pour ça sur une voix, des voix plutôt, encore une fois appuyées, vindicatives. Les cuivres reviennent, on s’inscrit là dans un rap large d’esprit. L’intervention, comme pour tout guest convoqué ici, est décisive. Elle se fait, de plus, dans notre langue. Dans le verbe comme dans le son, dans la particularité qu’il exhale, Artemisia est tout simplement l’une des meilleures surprises de ce mois de mars chargé en parutions significatives.