Duo de dames, paire de soeurs, Bonnie Trash débute à peine et déjà, se singularise. Son premier opus, Malocchio, voit le projet projeter, d’emblée, une accroche durable. Qu’on peine, d’ailleurs, à situer tant le rendu navigue, changeant, entre cadences et options, entre une PJ Harvey en retenue superbe et des dégelées post-punk bien amenées, comme peut l’être Goodnight my dear. Bonnie Trash est noir, un Maria de début au grésillement drone l’emmène d’emblée vers des terres éloignées. Une voix narrative orne le morceau, sans lumière. Puis Have you seen her, riffs puissantissimes en bandoulière, se déploie presque lascivement, mais aussi massivement. Un chant éthéré lui confère des airs shoegaze, il va de soi que musicalement on s’inscrit à la lisière des courants. Le bruit, en relief, est roi. Il se Siouxsie, atteint des sommets d’intensité et moi, je me laisse dévaster. Silence is a killer, aussi clair que bridé, hausse assez vite le rythme. Jamais figé, l’album persuade. On y entend tourment, exutoire et puissance rentrée, tantôt plus directe. Teeth, syncopé, se niche lui aussi dans une retenue belliqueuse.
Bonne surprise, fallait-il seulement le préciser, Malocchio a du chien. Lashes on fire, sur le fil lui aussi, allie le vrillé et le répété. Soudain, il déflagre. Dispo ici en vinyle, ici en CD, à ces deux lieux en version numérique pour laquelle tu claqueras ton fric, il castagne un Goodnight my dear écorché. J’entends les Kills, aussi, dans les tonalités vocales et dans les rythmes sans trop de peau, d’un apport certain. Perfect Moment (A Beautiful Reunion), sulfureux, fera des heureux. Il fait du boucan, tout en restant sauvagement mélodieux. Je perçois du shoegaze, par bribes et comme dit plus haut, dans le registre de Bonnie Trash. Et du vice sonore, par pelletées. Des coulées de noise, un Out of sea rouillé et, par ses zébrures, trouant l’azur.
On court le risque, à force d’écoutes, de sombrer dans l’addiction. Basta assure la liaison, dangereuse. Alors Shades of you, dans l’ombre, couple le sensuel chanté, le subtil, et le plus dirty. Les guitares assassinent, pris dans la nasse de Malocchio il devient difficile de s’en extraire. Il assaille, met à mal, susurre (I am a ball of fire) avant de se droner. Il délivre, pour finir, un abime de bruit. Emmalia Bortolon-Vettor: Guitar; Sarafina Bortolon-Vettor: Vocals, Lyrics, Drums et Maria Bortolon (Nonna Maria): Vocals (“Maria,” “Out At Sea” & “Basta”), d’une réunion de famille pour le moins porteuse, enfantant à l’arrivée un Malocchio de qualité supérieure, tant dans ses atours ceinturés que dans ses torrents de bruit brut.