Le Bruits de Lune de la veille m’ayant, pour une impression chez moi mitigée, servi de mise en bouche, je me rends à cette date avec l’envie, aiguisée, de la vivre plus pleinement. A mon arrivée je croise devant la porte close, l’une dans l’orga de festivals, l’autre musicienne, Caroline et Anne-Sophie. En devisant l’une des deux me lance, à l’évocation de mes aventures lunaires, que je pourrais écrire un livre. Elle dit vrai, toutefois si l’on prend en compte que je ne suis pas même foutu de boucler ma collection de tickets de lives, rassemblés dans de simples cahiers, l’affaire s’annonce ardue. Bref, si un jour…mais la Lune ouvre ses portes, comme toujours ou pas loin je suis le premier à y pénétrer. Un salut aux tenanciers, je dépose mon barda et retrouve le bar avec Adam El Mouden, autant dire Adam El Mutant ou encore, tel que je le nomme, euch’Damdam. Musicien de talent, bel homme, belle âme. Il m’offre une Nébuleuse, qui se transformera en Brewdog Punk IPA. Je lui promets, et le ferai, d’honorer son EP. Nous trinquons, merci ch’Damdam! Je regagne les gradins, j’annonce à qui veut l’entendre que ma reubié, je l’ai pas payée. Elle écourte mon attente alors que sur ma droite, déboulent quatre gaillards vêtus de blanc. Fatigué mais tout de même lucide, je réalise que ce sont les bonshommes de Darwin Expérience.
Darwin Expérience.
Je les méconnais, bon arrête de semer le doute Will, tu les connais pas du tout mais très vite, tu les apprécieras. La pop légère de ceux-là, en effet, régale de ses airs arrondis, de ses nappes douces, de ses encarts plus hardis. Il y a là de l’âme, de bons morceaux, des atmosphères qui remuent et, tantôt, optent pour l’amical. Pop, rock et électro, tout ça s’imbrique et de la collision résulte un set bien assez prenant pour qu’on le plébiscite. Le chanteur, on dirait Thom Yorke et la suite de titres des parisiens, qui ressemblent à Babamars, conquiert la foule. Stroke my hair, un brin funky, ou l’entrainant et plus acéré Which one am I, et le guilleret On the floor, suscitent l’adhésion. Le gig passe tranquillou, on sait bien qu’à la Lune les ouvertures valent leur pesant d’approbation. J’aperçois Sarah, amie prof, qui me fait des signes auxquels je n’entrave rien. Il est temps, grand temps, que le vendredi pointe ses quinze heures.
Darwin Experience/Σtella
Ca n’empêche toutefois guère, à l’heure où le Grèce se fait entendre, d’en tirer le plus grand profit. Σtella, après un album marqué par sa patrie et ses divines sonorités, sorti chez Sub Pop, dessert un concert de classe. Il est feutré (Nomad), il n’oublie pas d’appuyer le trait et se fait, régulièrement, typé (Up and away, superbe). Il lui arrive, retombant de trop, de me faire bailler. Mais globalement, on s’enjaille sans résistance. Il faut dire que les mélodies, dépaysantes, transportent. D’Amiens à Athènes, de la Somme à l’Acropole, il n’y a qu’une scène que Σtella, par son identité, investit joliment. Manéros, lui aussi, emmène son monde. Black and white est jazzy, la clique construit des trames à la marque déposée. J’entends mes Altın Gün préférés, au détour de tel ou tel titre. Ca groove, inconcevable de ne pas s’y rallier!
Σtella.
Il existe en outre, chez Σtella, un cachet rétro qui en étire le charme. Another nation, Grec autant que le Panathinaïkos, ou encore l’Olympiakos, nous extrait quand vient son tour de nos socles du quotidien. C’est bien à ça, aussi, que sert le live. De ce point de vue, la mission est accomplie. Σtella, son Titanic aux sifflements détachés, c’est l’assurance d’un trip. J’aperçois ch’Damdam, dansant, avec l’une, avec l’autre, chope en main. Fichtre, quel succès! Serait-ce le bonnet, façon marin grec échoué au quai Bélu? La moustache? Le teint halé? Peu importe, ce soir encore la liesse fait danser les fesses. La fin se pointe mais deux rappels la ponctueront, au bout du bout d’une prestation qui gomme entièrement, dans mon esprit, le sentiment insinué par le jour d’avant.
Photos Will Dum.