Garden With Lips est mené par Gildas Secretin, graphiste de l’Eglise de la Petite Folie où sort d’ailleurs ce perlesque Magnolia. Le musicien, dans une sphère intime, y conte treize chansons douces-amères au charme indélébile, jamais débile itou puisque le bonhomme, de ses mots, façonne des histoires imprégnantes. Musicalement, on navigue entre chanson -sans l’ennui qui parfois abime le genre-, pop, touches new-wave et, pour résumer, approche à la Garden With Lips. Le ton diffère, on le notera, en fonction de ce que raconte le sieur Secretin. Ca donne du cachet, de toutes les façons l’introductif Auroral et son instrumental chaloupé ne laisse guère planer le doute: Magnolia a du chien. Au mastering, John Trap. Sur quelques titres, à la voix et aux choeurs, Marie Pierre. Dans l’économie de moyens, on ne fait que plus vrai encore. L’éponyme Magnolia, au délié grisé, renvoie cette amertume cotonneuse autant que (modérément) vénéneuse qui souvent ici, avantage l’opus. L’Oubli restera en tête, de par ses notes pop-folk elles aussi en ombres, joliment syncopées. A chacune de ses étapes, Magnolia séduit. Là le morceau se souille, plus loin La Démesure du Temps et sa cadence flemmarde, son envolée à deux nous rappelle que Garden With Lips, c’est tout comme son label une histoire d’artisanale passion, de soin porté à l’objet, au son, au mot. Aux maux, aussi. Sûrement.
Jusqu’Au Bout de la Nuit, nos oreilles on lui cèdera. La chanson est pop, alerte, sertie de notes lorgnant vers le funky aiguisé. Comme dit plus haut, à chaque fois ça fait foi. Le savoir-faire s’entend, le verbe s’illustre et Magnolia, au gré d’auditions attentives, dégage des senteurs de plus en plus poussées. Ca s’emporte, là j’adore. Le timbre de voix vire à l’angoissé, au tendu. Et dans le même temps, en fond, au plus posé. Animal suit, chanson bien mise. Mais, tout de même, tumultueuse en sa fin. Avec classe. Direction Le sud, exergué par un ornement à nouveau concluant. Dans un obscur remuant, troublé, qui fait son effet. Bien fait. Bien joué. Enivrant, dépaysant aussi. Cordes inquiètes, magnifiques. Puis Tu Bouges, sur basse cold, à l’ambiance Disintegration. Album de détails, Magnolia est un album de taille. Guitares et sons vrillées, ici, étayent les susurrations. Descendre, exotique, lui aussi savamment décoré. Venimeux, dans son arrière-plan. Ca excelle par ici, l’alliage des voix rend coi.
Photo Matthieu Dufour.
Si ma première écoute, sûrement distraite, me laissa un sentiment mitigé, il se trouve que j’ai bien fait d’y revenir, d’insister, d’aller chercher. J’y trouve ou y retrouve, de ce fait, Une Essence Particulière. Racé, Magnolia est de surcroît généreux. Pas toujours heureux, sauf dans le résultat. Les Flots l’emporte, folk, dénué de toute tension. Mais éloquent. Magnolia après la Pluie s’étend, posément. Le mot y domine, tracé par une belle mine. On se dirige, peu à peu, vers ces montées tendues qui épicent l’album. Chant en duo, encore. A trois quand chez moi, j’en reprends les textes. Avant le flou, avant cette terminaison faussement tranquille qui à son tour captive sous climat fascinant, palpitant. Vibrant. Le propos s’anime, se fait plus offensif. C’est réussi. Magnolia, sans discontinuer, hisse son maître vers des sommets d’idées, illustrées par un digipack en tous points abouti.