Projet solo de Julia Kugel, issue de The Coathangers, Julia, Julia voit la dame, plus feutrée qu’à l’accoutumée, établir un registre sucré, un peu « de sirène » dans le sens où son chant, sucré, évoque celui d’une Hope Sandoval (No Hard Feelings, par exemple). Derealization, son premier opus qui traite du cheminement vers l’acceptation de soi, resplendit ainsi de onze chansons graciles, parfois dream-pop, au milieu attirant. I Want You, entre guitares folk/indé et batterie marquée, illustre tout ceci, d’emblée, avec une certaine éloquence. La qualité s’installe, de mon côté c’est l’air pensif qu’absorbé, je dévore ce disque. Julia y joue tout, ou presque, et y place des trames sombres dont l’attrait ne se dément jamais. Forgive Me, rêveur et aérien, susurre jusqu’à ce qu’on s’en entiche. Impromptu renvoie la même beauté, une sobriété similaire dans son décor. Alors il fait mouche, instaure un rythme sans tapage mais en vue, devenant à ce moment Fever In My Heart. Pourtant, c’est bel et bien vers l’énervé qu’usuellement, va ma préférence. A ceci près que Derealization, dans la brume, m’attrape et referme sa trappe. Je suis pris. Au piège.
Words Don’t Mean Much, de bruits dark en étayage simple, mais bien trouvé, poste sa superbe. Tranquillement, dans un léger trouble. Il se suit de Do It Or Don’t, tambours en avant mais là encore sans heurts, qui à son tour séduit de par ses contours. J’aime, aussi, la pochette sépia de ce Derealization. Ses histoires de vie, son ton faussement serein et bien d’autres choses. Big Talkin’, après le No hard feelings cité plus haut, évolue tout aussi posément. Paper Cutout, aux sons d’éther, quitte la terre. Intime, l’album embaume, répare les plaies, obscurément thérapeutique. Where Did You Go en amorce la fin sans le brusquer, sans rompre le charme non plus. Ici aussi, on relève la marque de l’ornement, ses penchants désossés nacrés de choeurs. Enfin Corner Town, serti lui aussi de sonorités qu’on entérine, se charge de finir avec autant de panache. Ecouté fort, Derealization fait ressortir ces petits sons, ces notes bien pensées, ces textures personnelles qui ajoutées, enfantent un magnifique opus.