Trio de multi-instrumentistes tenant avant tout dans l’union entre Frédéric D. Oberland, Stéphane Pigneul et Mondkopf, Oiseaux-Tempête m’a toujours fasciné. Par son adresse à conjuguer fougue et contemplation, bruit et sérénité troublée, à créer un genre que depuis quelques galettes déjà, on lui reconnait volontiers. En s’assurant, c’est encore le cas ici, la participation de guests de poids, il donne plus de relief encore à son registre, hypnotique, narratif, sans pareil. WHAT ON EARTH (Que Diable), où s’invitent en termes de chant Ben Shemie (SUUNS), l’éternel G.W.Sok (The Ex) et Radwan Ghazi Moumneh (Jerusalem In My Heart), alors que les percussions échoient à Jean-Michel Pirès (Bruit Noir) et les cordes électriques à Jessica Moss (Thee Silver Mt. Zion), saisira l’auditeur en lui livrant, variées, fortes d’un langage musical à la Oiseaux Tempête « et puis c’est tout », dix morceaux à la superbe abimée. Black elephant, d’abord vocalement loufoque, psyché, céleste, lance la danse en visitant le ciel. Il se syncope, propose des voix déshumanisées. Résultat? On trippe. Déjà? Oui, sans aucun recours possible. Et si tu voyais ça en live, camarade, tu en perdrais le souffle. Mais reprends-le vite, Partout le feu s’étend « lancinament » (c’est à dire avec lancinance), mais aussi dans un fracas retenu jusqu’à lui aussi, en tournoyant, nous rallier à sa cause. Cuivres déglingués, mais magiques. Ambiance trouble, mais immersive. Terminal Velocity arrive dans la foulée, plus court, en vagues célestes. Il chloroforme. Voodoo Spinning suit, en ruades souillées/majestueuses. En se bridant, au bord du gouffre, Oiseaux-Tempête pue la classe. Le savoir-faire, l’anormal passionnant.
The Crying Eye — I Forget, sur vingt minutes parce que chez ces gens-là, on aime les grands formats, nous place à son tour sous éther. Sa délicieuse torpeur, communicative, dépayse et les voix, évocatrices, appuient ce déracinement. Bordel, c’te magie! Ca plane, il y a là du Young Gods ou alors, c’est que je suis un peu trop fan. Toujours est-il que l’écoutant, captif, ne sait plus où il habite. Et la sensation, tenace, ne se remplace pas. Sauf, peut-être, par l’écoute de A Man Alone (In A One Man Poem). Plus de dix minutes, pas la moindre seconde à zapper. Séquences obsédantes, chaos nourri et racé. De partout, des sons fous. Ces cuivres, free encore, qui lacèrent. Puis, splendide à nouveau, le chant. Collectif, Oiseaux-Tempête est tout à la fois sauvage et bien mis. Waldgänger, en revenant à une certaine forme d’obscure sérénité, sème un joli trouble. Posé, mais pas linéaire. Nu.e.s Sous La Comète prend le relai avec en fond, puis plus présent, une…Tempête, tiens donc, qui ne demande qu’à perforer l’azur. Elle est belle, bien ornée. Dôme (Live at Oscar Niemeyer’s Abandoned Fairgrounds), enfin, rejette une poignée de sable dans l’esprit de l’assemblée, qu’il gratifie aussi de coups de semonces épars et très noirs. Là aussi, le contenu force à l’immersion. Puis Horizon rouge (ad lib), en bonus cd spatial, nous refuse la redescente. La matière sonore d’Oiseaux Tempête, singulière, assurant là voyage et décollage, saillies et tranquillité perturbée sur une série de compositions tout simplement impressionnantes. Superbe album.