Après avoir, en 1991, magistralement repris Kurt Weill, les Young Gods font suite à l’excellent Data mirage tangram, ainsi qu’à la réédition d’un première pierre séminale, en nous offrant ce Play Terry Riley In C qui les voit s’en prendre, avec audace et grand respect, à l’ouvrage de Terrence Mitchell “Terry” Riley, référence de la musique minimale, sorti à la base en 1964. Découpé en phrases, l’effort voit les Gods taper des phases, répéter en captivant, insufflant leur touche spatiale -et spéciale, spécifique même- mais agitée, à l’effort visé. Prenant, cosmique mais doté de fulgurances maison, Play Terry Riley In C grimpe et retombe, place sous hypnose, s’enhardit comme sous produit, fascine et provoque la dépendance. Ou la fuite car disons-le, il faut les suivre ces trois-là! L’effort vaut la peine d’être fourni, on jouit là des sons et climats made in Jeunes Dieux que Part 1, à l’invariabilité apparente et passionnante, dépose sans crier gare dans nos esprits engourdis. C’est du grand oeuvre, il est impératif de s’en immerger sous peine de rater, sans conteste, des temps forts de déconstruction maison dont Franz Treichler et ses acolytes ont le secret. L’opus s’acidule, dans le même temps il réitère ses notes et rafle la maximale (de note). Part 2 percussionne (elle était tentante..), ici bas on s’élève et le lunaire, merveilleux, le dispute à l’indus obsédant.
C’est sur près de 60 minutes, terrestres, physiques, célestes, magiques, que la magie opère. Libres, les Suisses cheminent et à nouveau, séduisent. A l’éther se joint le coup de semonce, dans la variation les Young Gods font diversion. In C bouillonne, fusionne…avec les sens, qu’il percute ou s’en vient flatter. Il déstabilise, se radicalise, traverse les cieux et clôt les yeux. A s’y méprendre, on s’en éprendrait. C’est pour moi chose faite, si Part 4 varie peu il n’en oublie pas, pour autant, de s’emparer de l’auditoire. Part 5, dans un orage tout en saccades, poste ses ruades. On se fait bouger, de montées en redescentes on n’a pas fini de tirer profit. Joué d’un jet, sans discontinuer, le disque s’emporte, défonce des portes, riffe soudain avec une violence qui me transcende. On retrouve pour le coup, splendides, tous les ingrédients qui singularisent le groupe. Part 7 ondule, (se) syncope, se rythme et damned, je n’ai un regret un seul, sans réelle valeur semble t-il; celui de l’absence de chant. Qu’importe, Part 8 m’envoûte. Par ses boucles, ses guitares guerrières, ses reflux incoercibles. La fin est proche mais pour l’instant, les loopings dudit morceau me font du gringue. C’est alors que Part 9, dans une accélération décisive et incisive, porte les Dieux aux cimes, à l’issue d’un hommage marqué tout à la fois par la classe et le brio d’Helvètes esthètes qui font grand bien à la musique de notre époque.