Le mois de mai, à la Lune, offre une brochette d’affiches de choix. La triplette de ce samedi soir l’inaugurait en proposant, dans des approches différentes, 3 clans de grande valeur dont le premier, Last Night We Killed Pineapple, eut le don d’enthousiasmer, une fois de plus, la foule locale. Il faut dire que le trio, ayant dans sa besace 2 ep’s irréprochables, dont ce Multicolor qui le voit franchir une marche supplémentaire, a de quoi fédérer et ses lives fougueux, celui-ci n’échappant pas à la règle, atteignant la cible à grand renfort de titres enlevés, plaident en sa faveur. Rock fonceur, post-punk, élans surf, traces de psychédélisme, voix tantôt sauvage, tantôt plus aérienne font ici bon ménage. On tue les fruits (Ananas mort), on fait dans la finesse/bourrasque (Plus seul), on joue garage et avec rage. Ca enchaine sans rupture ou presque; Charles, le guitariste, prend son bain de foule après nous avoir gratifiés d’échappées soniques bien senties. Quand LNWKP trace sans freiner, dans la maîtrise, on lui emboite volontiers le pas. Mario castagne, chante wild, à ses côtés son frère Pierre tient la basse comme un dandy appliqué, léger sourire au coin des lèvres. Il le peut, la clique d’Amiens ce soir encore régale. Merci les gars, vous gardez de plus la Tête Froide (petit clin d’oeil au label créé par les gaillards) et à ce train, on vous attend désormais au coin du bois avec des désirs d’album.
Last Night We Killed Poneapple.
A l’issue de ce temps fort Famous, « from London » surprend en livrant, parfois direct et bruyant, parfois expérimental, un post-punk qui bouillonne autant qu’il se syncope à l’occasion. De chant sensible (The valley, intime et ténu), il évolue vers des sphères frontales (Nice Whilst It Lasted), se modère avant d’imploser, joue sur les tons avec un bel aplomb. Sa palette est étendue, des guitares sauvages où samples inspirés (The Beatles) y trouvent place. Le guitariste, d’une dégaine façon Trainspotting -je l’ai d’ailleurs cru Ecossais-, se tord et délivre des parties tranchantes. La trouvaille se prend sans tergiverser, il est bon d’être ainsi bringuebalé. Famous pourrait le devenir, on n’en serait guère surpris tant il se démarque et malaxe, agilement, des éléments disparates. A l’Anglaise, donc talentueusement. C’est d’ailleurs un excellent England EP, sorti en mai 2019, qui le premier révéla les dons du groupe. Famous, on peine à réellement le définir. Il peut bricoler façon Soul Coughing (Surf’s up!), s’enrager sans se brider, lancer des incartades sinueuses; au final il rafle, à son tour, des galons qu’il n’aura pas usurpés. Loin de là.
Famous.
On pourrait s’arrêter là, comblé. Mais il nous reste Los Bitchos, dépositaire lui aussi d’une formule singulière, pour enfoncer le clou avec les morceaux de son Let The Festivities Begin!, sorti chez City Slang, à l’intitulé prémonitoire. Issues des mêmes recoins que Famous, les dames et leur acolyte masculin servent une cumbia instrumentale complètement jubilatoire, surfy, endiablée, stylée aussi, à laquelle elles donnent des abords divers. Ca groove de ouf, comme diraient les djeuns. Ca peut être délié (Tropico), faire dans le cool contagieux, se parer de percus qui forcément entrainent tout le monde dans leurs salves. Los Bitchos, tout comme les deux formations l’ayant précédé, se démarque avec un panache ébouriffant. Guitares dopées à la prestance, rythmes fous (Tripping at a party, on est décidément dans un esprit festif ce soir) ou plus tranquilles, chants occasionnels, joie de jouer et union visible engendrent un set phénoménal et je pèse mes mots, enfin il me semble. Le public, dansant et épris, ne me contredira sûrement pas. Lindsay Goes to Mykonos, on s’y rend avec elle. I enjoy it, du début à la fin, comme le prétend ladite composition où les voix apparaissent. Los Bitchos font un carton, imposent une identité rafraichissante, bien à elles, pour parfaire une soirée qui dans l’attente de la venue de Crack Cloud, ce dimanche soir, aura semé bonheur et bonne humeur. Le tout dans une salle, notez-le bien, pleine à craquer puisqu’affichant complet avant même l’ouverture de ses portes.
Los Bitchos.
Photos Will Dum.