Mauvais Sang, c’est du poème que bousillent des guitares noise. Une harpe, qui met de la majesté -et pas que- dans le chaudron en ébullition du quintette. Ca se met en marge, c’est d’ailleurs ce qui au premier bord m’a interpellé. Décor, dans un tumulte aux guitares bourrues à souhait, tranchantes, lance un premier pavé marquant. Il fait du noise, pose des breaks où le mot prend les commandes. Bushman Hole montre autant de caractère, de prestance dans le verbe, se laisse lui aussi balafrer. Son duo vocal à deux genres le valorise, ici la harpe sous-tend le contenu autant qu’elle l’embellit. Le Refuge de la Vormaine apaise, met du baume et son climat en exergue. Inspiré par le film de Leos Carax sorti en 1986, Mauvais Sang s’appuie ensuite sur une électro d’ombre (3h47), qu’il finit par lézarder avec panache. Son style est indéniable: Léo Simond au chant, et ses acolytes (Guitare /Guitar: Mathis Saunier; Harpe /Harp: Marion Pozderec; Clavier /Keyboard: Mathieu Vasey; Basse/Bass: Valérian Burki; Batterie /Drums: Antoine Vercellotti), à l’unisson, innovent. La démarche est évidement bienvenue. Ventriloque fait dans la finesse, tout juste animé par une batterie qui annonce l’orage.
Sorti chez December Square, Des corps dans le décor est une belle surprise, qui soigne ses décors et fait dans le sanguin. Le morceau accélère, décoré par des sons mélodieux. Dieux, ensuite, déboite en syncopes. Il pulse, on n’a alors plus à se faire de Mauvais Sang; le rendu gicle d’une bonne cuvée. Interlude assombrit l’horizon, dans sa foulée Monument impose une retenue aux limites de l’angoissant et du merveilleux. Mauvais Sang pose ses bases, pour un tout premier LP il collectionne les bons points et renvoie une belle identité. Corps gronde, son arrière-plan ne demande qu’à déchirer le tableau. En fusent des sons, comme souvent, acides, qui vont de pair avec une atmosphère oppressante. C’est confirmé, Des corps dans le décor permet un envol appréciable que certes, il faudra valider dans le futur mais qui déjà, affiche de réelles promesses. Corps s’énerve, donne du tambour, puis se termine. Venus Anadyomène, aux riffs crus, amorce la dernière ligne droite en noisant sur lit de Français racé, sombre et d’obédience quasi indus.
Photos Coralie Degeneve.
On touche alors au but et le groupe, assurément, se pare d’une carte de visite en tous points éloquente. Quand Disparaître, au moment de conclure, délivre sept minutes, passées, de classe textuelle qui n’est pas sans évoquer un Noir Désir. Mauvais Sang, pour le coup, alterne sans faillir temps calmes, ou sous tension, et passages volcaniques. Le procédé est bien en place, Mauvais Sang fait montre d’atouts en nombre et porte une douzaine de compositions synonymes de personnalité, de bon augure quant à la suite de son parcours artistique.