Galaguerre a deux ans, environs. Il s’adonne à embrumer des compositions acidulées, triturées, que recense cet excellent Waterworld. Neuf titres auxquels Guidelines, le premier d’entre tous, donne pour débuter une coloration post-punk à base de BAR (boite à rythmes) minimale, de guitares elles aussi sans graisse et de halo vaporeux destiné à enrober l’bazar. Ca prend direct mais Galaguerre est facétieux, fait les choses avant toute chose à sa manière. Il aime brailler, flouter son oeuvre aussi, à l’occasion. Ghostrain, dans le brouillard tout au moins en son début, réitère toutefois cette trame d’obédience post-punk, alerte, cold aussi, nappée de sons que seul un cerveau « bancal » peut concevoir. Donc bons, très bons. Et beaux dans leur écarts. Seamilk, plus tranquille pourrait-on dire, se saccade et livre un chant gris. Il est psyché, adopte une cadence presque hip-hop (si si). Un peu flemmard, il passe la barre sans avoir à forcer. Sa fin se lézarde, je m’y attendais car Galaguerre ne peut rester complètement « attendu ». Eveleen, surfy, détendu, fait carillonner ses sons sur une écorce faussement polie, dans une indolence un brin polissonne.
Galaguerre s’en sort bien, Dolly développe des penchants dream-pop sacrément bien sertis. Son opus sort chez L’Etourneur, on lui souhaite d’aguicher les tourneurs. Il me plait, surtout parce qu’il aime à dévier. Mais aussi parce qu’il se cabosse, part dans des songes aussi éthérés qu’énervés. En se répétant, il m’imprègne plus entièrement encore. Street Sharks, bordel aux voix unies et criées, lui file une allure post-punk sans surcharge. Son boucan est bon, on ne s’y oppose surtout pas. On lui trouve, dans le même mouvement, des sonorités claires qui assurent le contrepoint. Il marque donc des points, sa note sera bonne mais c’est tout d’abord l’écoute empilée qui tranchera. En sa faveur, évidemment. Copacabana expérimente, se fait drone, broie du noir, malaxe l’esprit. A sa moitié, il vire en un labeur barré, spatial, à ne classer nulle part. C’est le propre de Galaguerre, de se trimballer entre les sphères, jusqu’à atteindre la sienne. On l’y accompagne, séduit par sa nouveauté. Galapop, aux bruits entêtants, se boursouffle et mue, bruitiste mais aussi psyché. Sa longueur l’insinue, sans résistance à lui opposer.
En toute fin de créa Bloody Movie, de sa pop tarabiscotée, hypnotise. J’ai l’impression, en plus « chercheur » encore, de retrouver Gablé qui vient lui aussi, d’ailleurs, de Caen. Tout comme Häshcut, bel explorateur lui aussi. Avec Galaguerre, le charme opère et la route est escarpée. On l’empruntera avec plaisir, sans guide ni direction prédéterminée, au gré de ce Waterworld turbulent et de belle facture.