Chocolat Billy ? Nom d’con, zik eud’génie. Sont bordelais, font dans le dément, se piquent les instruments. Existent depuis 20 ans, doivent avoir vieilli non?? T’es taré, jamais été aussi juvéniles dans leur pop foutraque, qui met Le feu au lac et prend des chemins qu’on emprunte rarement. Ils ont joué avec Deerhoof, The Ex, Thurston Moore, The Osees et d’autres, pas moins sinueux. Alors forcément, le registre institué par Jo Burgun : drums, perc., guitar, vocals, cassettes, whistling; Armelle Marcadé Magermans : vocals, synth, electronic pad, midi trumpet, flute, saxophone; Ian Saboya : guitar, vocals, electronic pad, synth et Jordan Pirozzi : bass ne peut se résoudre à filer droit. Où vas-tu Zolatale ? prépare la fiesta en nous servant, en guise d’apéritif, un pseudo instrumental alerte, doté de synthés guillerets, sur cadence vive.
On prend, sans savoir où tout ça nous mènera. Il y a une sorte d’euphorie pop, ici, qui tend à la joie. Au cinéma illustre mon propos, il voyage et fait surgir des souvenirs. En plus, il est beau et soutenu. Je kiffe, je fais mon djeun’s mais Watch out! me rappelle à l’ordre ou plutôt, à l’écoute. Il trace, fait bavarder ses guitares, fait le fou et tape dans l’mille. Il coupe l’élan, pose un joli décor un brin trouble. Chocolat Billy se démarque, Jacques revient de la pêche narre une histoire décalée, se fait funky, se dope à la classe mélodique. Soniquement, l’inventivité est au zénith, servie par un panel large. Les chants s’affolent, adoptent des intonations tarées.
Après cette entrée en matière merveilleuse Cinecittà, assez court, dépayse, insulaire dans ses sons. L’orientologue traficote ses voix, poste un groove fatal sans dire son nom. On ne le classe pas. Il me fait penser tout de même, dans ses motifs, à Young Marble Giants. Il hypnotise, charme aussi, déballe des textes à part. J’adore, j’ai toujours été friand de ces bazars qui serpentent et captivent. Qu’on décrit difficilement, qu’on écoute avec acharnement parce que bon, pas toujours aisés à disséquer. Mais tellement bons! L’appartement nous ouvre ses portes, ses mots sont adaptés d’un rêve de Georges Perec (dans La boutique obscure), librement. On y reste scotché (aux mots), autant qu’au climat qu’il souffle. L’album sort chez Kythibong et Les Potagers Natures, preuve de sa fiable déviance. Devant derrière Californie chante en…euh je ne sais plus quoi, fait son B 52’s de par ses synthés, juste trop bon lui aussi. Il se fait cold, plus direct: j’adhère. Du coup, Je danse dans le noir. Sons déracinants, histoire dingote. On trippe, encore. Arrive alors Scutigères flamboyantes vs rats de bureau, dont le texte fut trouvé au Novo Local à Bordeaux.
Photo Nahia Garat.
A son tour, il raconte un truc passionnant, d’autant plus qu’il évoque le monde que nous nous construisons, un peu underground, en réponse à ce réel de chiasse. J’aime puissance 10. Me voilà converti, j’ignore si j’avais déjà chroniqué ce groupe auparavant. Il me semble que oui, dans le cas contraire j’espère vous en rapprocher par ces quelques lignes. Contre toute attente, dont l’intitulé pourrait parfaitement résumer l’approche de Chocolat Billy, vient finir le taf dans un format qui n’est pas sans m’évoquer Kusturica, aux effluves du bout du monde, serti de guitares qui rigolent pas trop. Entre autres sons générant l’addiction. Inventif, anormal et c’est un compliment de taille, Le feu au lac est un brasier de créativité de base pop mais aux contours déraisonnables, mis en valeur par onze chansons resplendissantes.