Produit par la SnapArt Factory, à l’occasion des 10 ans de ce festival qui ne cessera d’être, d’entre tous, mon élu, le Fest of Friends de Nicolas GAUTIER réalise un exploit. Celui, « impariable » à la base, d’égaler la magnificence dudit événement, pensé par une ribambelle grandissante d’Isariens se refusant à n’être rien. Qui, partis…de rien en dépit de cette prétention, ivres de passion, d’amitié soudée par le son -le bon, celui de chez Michel, du Mange Disque basé à Clermont, qui avec passion nous parle de la sienne-, en sont venus à établir un « CDF » de paille et de verdure, de liberté sans chaines, dans ce Cernoy où tu viens pas pour des noix (notez la médiocrité de l’humour..). Un CDF dont la qualité musicale, la communion humaine et sonique n’aura jamais d’égal dans ma caboche de vétéran de la scène régionale.
On déniche dans ce Fest of friends, avec pour écrin une superbe création de Valentin Contestin, l’incontestable (décidément…), pléthore d’interviews des principaux acteurs du CDF. Défonce -à la vie- et réflexion, juste et profonde, y crèchent sous le même toit. On y voit, frappant, un amas de compétences qui font qu’à l’arrivée, le CDF, tu t’étonnes bien moins de son incommensurable portée. Des parcours riches et bien imbriqués, une sincérité dont beaucoup devraient s’inspirer. Un éventail musical qui doit, depuis belle lurette, faire pâlir plus d’une orga. Un climat, une ambiance, un lien social (je cite, pour le coup, un local ayant prêté main forte) indéfectible. Une solidarité que dans ce monde, nous peinons à retrouver. La diversité, totale. Et la forêt.
Richard Allen/La Jungle.
Tu trouves dans ce Fest of friends, la preuve que l’humain peut triompher. Tu y vois des images sans fard, splendides de vérité. Des lieux, ressourçants. Transformés, sans les dénaturer. De la créativité, de l’imagination à en crever. Antoine, touchant, amusant aussi, quand il déroule le fil, devenu une pelote, de ce CDF béni. La nuit, et là tu es cuit, mais regonflé. Allez comprendre. Un esprit qui, comme le prétend Alexis, se doit de perdurer. Psychotic Monks, noise, incandescents, à une heure tardive. « Ils sont tous extraordinaires », souligne Michel. Buriné, intègre, trois vies derrière lui. Un vrai, comme l’intégralité de ceux qui oeuvrent à la bonne tenue du CDF.
Dans ce Fest of Friends tu te fades, merveilleux de cohésion, le Old Moonshine Band. Quelle plus belle preuve d’amour, d’amitié, que ce collectif de talents pépitesques? Je devrais, tous, les citer. Ils sont trop nombreux pour ça, leur nombre n’a fait que croître et dans le même temps, le CDF croquait en qualité n’importe quel autre festival prétendument complet. Il est fort, ce Nicolas Gautier. Il est beau, ce Fest of Friends. Tu peux le louer, tu peux l’acheter mais une chose est sûre, tu t’y replongeras. Comme dans un set de Cheap Wine, intense, enragé, aux effluves 70’s dopantes. Comme quand le Swinging Dice, au cachet rétro fatal, te met le cul par terre. S’il n’y avait que lui…
Swinging Dice/Radio Moscow.
J’ai senti dans ce Fest of friends, le désir de figer le bonheur. La galère aussi car dans le projet s’insinuent le doute, l’interrogation. Balayés, d’un revers de manche, par la passion et la ténacité. J’y ai vu, magique, un art pluriel et transcendé. J’y ai vécu, j’y ai revécu, une part de ces concerts galvanisants qui jonchent les 3 soirs de CDF. J’y ai suivi des discussions, d’asso. A bâtons rompus, constructives, participatives. Lucides, rêveuses parfois car sans ce rêve, peut-être que tu crèves. Mais le CDF, il est toujours là. Vert, boisé, l’écorce solide. J’y ai vu, j’y ai senti, j’y ai fendu souvent, appareil en main, ce public en proie à des temps de félicité qu’en d’autres lieux, il ne vivrait pas avec autant de force.
Dans ce documentaire, on v(o)it une construction. Patiente, pensée, chaotique en son début, désormais affirmée. Du vinyle, omniprésent, ouvragé avec minutie. Une famille, une charretée de groupes plus ou moins interchangeables. Le Celebration Days Revue, ensorcelant. Du soleil, un esprit. Des premiers pas dans les champs où débarquant avec un collègue éduc’ possesseur d’une caravane pliable (remontant à des temps foutrement révolus, petite remarque à l’attention de ceux qui nous singèrent alors), nous fîmes…sensation? Ce n’est pas le bon terme, nous aussi cet été là nous chiâmes dans les bois. Peu importe, CDF je t’aime. Depuis le début, et sans conditions…un jour peut-être, tu seras tatoué sur mon épaule. Mais je préfère te vivre.
Cheap Wine/Public.
Ton rock, ton blues, ta folk, tes embardées psyché, tes giclées garage ne se remplacent pas. Tes cuivres bercent les âmes ivres, de partout tu convies le meilleur. On se demande un peu, craintifs, jusqu’où tu iras. Mais bien trop intelligent, tu maintiens ta foule à des mesures humaines, tenables. Là est ta force: fédérer, semer à chaque recoin de bois des morceaux de bonheur qu’à l’issue, nos coeurs garderont en eux. Chaque année on t’attend, fébrilement, comme si tu étais notre dulcinée. En ce printemps, l’expectative se double d’une vive impatience. Sevrés, nous réclamons nos three days de Célébration, trompés pour l’heure par l’excellence de ce Fest of Friends si bien nommé.
Photos Will Dum.