Déjà apprécié pour son Thumb world (février 2020), le Pictish Trail de Johnny Lynch poursuit sa route avec un juteux Island Family, assez magistral. On y trouve, portés par le savoir-faire de l’Ecossais, dix titres dont les deux premiers (le morceau éponyme et ses bricolages à la Beck, trépidants, psychélectro. Puis le second, nommé Natural Successor, avec ses accents rock bourrus sur lit de sons triturés), imparables, dont d’emblée sensation. Deux galettes à l’amande, troussées comme le font les grands. Alors que The River It Runs Inside Of Me, un brin Eelsien, marie mélodie du chant et enrobage plus « abimé ». Il y a là, de plus, une vigueur qui tire le disque vers le haut. Et ce sens du collage, de l’assemblage à priori improbable qui fonctionne magnifiquement. In The Land Of The Dead, dans son électro joueuse et alerte, valide d’ailleurs la grande forme dans laquelle on retrouve Pictish Trail. Il se déroule de manière tout à la fois spatiale, subtile et déjantée, au gré d’une inspiration conséquente. Et se cuivre en sa fin, enciélé.
A sa suite It Came Back, objet d’un clip fou, présente ses trouées à la Liars auxquelles se greffe un chant doucereux. Pictish Trail, ici, creuse toutefois ses propres sillons. Il vogue entre les genres, tutoie les références citées plus haut en termes de qualité du rendu. On en est alors au mitan, des réjouissances, sans aucun accroc. Thistle vole, aérien, dans un écrin cette fois élagué, moins porté à la déjante. Ca prend de la même façon, il en émane une électro/psych-pop de choix. Puis Melody Something, d’abord rageur, se syncope en se faisant aussi explosif qu’affiné. C’est une réussite de plus, filante comme posée. Nuclear Sunflower Swamp lui emboite le pas en se saccadant lui aussi, groovy, dans ses ritournelles une fois de plus bien mises que des plans décalés sertissent. Expérimental, Island Family tient toutes ses promesses.
Green Mountain, l’avant-dernière de ses incartades, durcit le ton et se poste, à mon sens, entre Primal Scream et Death in Vegas. Rock, pop et électro, exubérant, sonique et jubilatoire. Et élégant, qui plus est. Enfin Remote Control, en terminaison apparemment posée -on ne sait jamais avec ce diable de Lynch-, vire rapidement en un effort électro-pop vrillé, truffé de sons trop bons, doté d’un break étonnant. Le constat qu’on en dressera, en tout cas, est clair, net et précis: Island Family, à sortir chez Fire Records, est un album étincelant, « chercheur », valorisé par une dizaine de chansons splendidement conçues.