Formé lors du confinement, Rio allie Maxime Pelletier (Pilori Prod) et Lio Van Erck (Le Prince Harry, Komplikations…). Des démos sont crées, elles tombent dans les machines de Paulie Jan, producteur et arrangeur, après que la paire ait pris la décision, dans une bâtisse à l’histoire étrange en plein cœur de la capitale grecque, de croiser ses regards sur la musique. On l’en loue, ce Alkyonides présentant dix chansons qui dés Arga arga, l’inaugurale, groovent d’une électro dépaysante que le chant de embrume. Boucles aux effets dansants, motifs déroutants, cadence marquée. Stylistiquement, rien de trop défini. Merci. Ca accroche « direct », ça sent en plus le personnel et ça, c’est de bon augure. Le début envoute, comme joué sous les voutes. Les vocaux s’associent, toujours dans l’éther. Crever ça arrive, en termes de sons obsédants, s’impose ensuite et consolide une entrée en matière pour le moins assurée. Le registre ne se compare pas, issu de ces deux cerveaux fertiles et bonnardement dérangés. Spatial, le titre emmène dans un ailleurs. Puis Moni Yunaika, aux synthés volants/virevoltants, accroit ce sentiment d’envol, de déracinement, qui accompagne Alkyonides. Lio, à nouveau, nappe le tout de son chant de Dame…à moins que ça ne soit celui du complice masculin, je m’y égare un peu. Des écrins décalés, grandement imaginatifs, font en tout cas le contrepoint de ces voix.
Photos: Léna Brudieux/Mona Stério.
Plus loin Dolphinopost, bardé de ces sonorités dont on raffole, joue lui aussi et à son tour une électro vaporeuse, syncopée. Céleste aussi, et totalement prenante. Pour une doublette encore « verte », tout au moins en termes d’existence, Rio convainc étonnamment. Tout près de toi, comptine sentimentale, brille obscurément. On relève, en l’occurrence et une fois de plus, l’ornement notable. Ceci, qui en doutait?, dans une étoffe haut perchée. The Chauffeur s’y cantonne d’ailleurs, étayé avec la même maestria sonique. Et ce sens, perceptible, de l’ambiance drapante, lancinante jusqu’à s’ensocler (j’invente, je détourne la langue de manière à ne pas « faire comme ») dans nos esprits. L’album sort chez Teenage Menopause Records, ça se prend tout autant. Serena, d’un tissu similaire, propose textes dignes d’intérêt et matière douce-amère, à nouveau captivante. Il s’acidule, groove sous ses basses, prend des teintes cold. A c’t’heure, come on dit dans l’Nord, Alkyonides fait notre bonheur. Ravin, où l’on s’engouffre avec délices, suinte une électro d’entre les nuages, aux bruits qui se répètent. Sans se faire réellement tapageurs, mais en retenant l’attention de manière durable.
Peinture de Marie-Pierre Brunel.
Sortilège, cordé, flirte avec l’indus mais reste, c’est la marque d’ Alkyonides, du Rio pur jus. Ses sons fusent, gentiment. Il en émane, c’est là aussi une constante, un pouvoir d’attraction difficile à endiguer. On ne s’y essaye même pas, Caro Pinocchio se chargeant de nous hypnotiser pour la dernière fois au gré de voix narratives, de langue inattendue, et d’un canevas qui mêle notes réitérées et passages à dominante « dirty ». Rio, au carnet de sons bien à lui, vient de lancer sa carrière, qu’on lui souhaite longue et prolifique, en se dotant d’un disque accompli de A à Z, illustré par une série de compositions à la sphère jouissivement « emprisonnante ». Une généreuse série de dates est prévue dès la fin mars, histoire de distiller le groove immersif des deux comparses.