Mené de main de maître(s), depuis plus de vingt ans, par la paire Nicola Kuperus/Adam Lee Miller, Adult réétale ses abords indus en se parant, pour l’occasion, de matériel nouveau; une pédale de boucle vocale pour Kuperus, et des pads de percussion Roland au profit de son acolyte. S’ensuit une suite de huit morceaux froids, cinglants et presque martiaux, bien vite addictifs. Undoing / Undone ne laisse guère planer le doute, il use de sonorités en lisière de la normalité et percussionne avec insistance, sur fond de chant déviant. Stridences et plans techno souterrains se donnent le change, ça groove sévèrement et Our Bodies Weren’t Wrong vient à son tour rafler la mise. Gimmicks façon Throbbing Gristle, incrustes m’évoquant le Depeche Mode des débuts, glacé/indus, créditant sans coup férir un disque qu’on sent accompli, sans concessions ni gazouillis à la vie. Fools (We Are…) balance de la boucle, trépide, se positionne entre cold-wave et électro dark. A chacun de ses efforts, Adult se hisse sur les plus hautes marches de sa sphère décalée, où il fait office d’étalon, un brin culte et ça ne fait que raffermir son attrait.
Normative Sludge, au mitan de Becoming undone, débute dans le flou. Sa voix émerge du lointain, pas plus normée -surtout pas, d’ailleurs- qu’à l’habitude. A l’orée des deux minutes, le tempo s’affirme et des bruits acides giclent. On est là dans un globe de noirceur, sacrément attirant. Musicalement, on ne sait plus où on habite. Ca nous va, c’est le signe qu’Adult a depuis belle lurette trouvé sa posture, une vision qui nous le rend in dispensable. I Am Nothing offre, quand vient son tour, une nouvelle pelletée de gimmicks forts. Il me fait penser, en ce qui le concerne, à nos Maman Küsters préférés. Le climat est similaire, la folie commande. Ca se danse, ce truc-là, dans le noir et comme un possédé. She’s Nice Looking fait dans le spatial bien psyché, Adult s’évertue à dérouter l’auditoire et en l’occurrence, s’en prend à sa santé mentale. Lentement la chanson prend vie, si on peut dire, jusqu’à s’imposer définitivement. Elle file dans la nuit, grinçante, obsédante.
Plus loin I, Obediant, de ses salves percussives, gagne lui aussi nos faveurs. Il propose une techno tarée, sans trop de couleurs bien sûr, faite maison. C’est chez DAIS Records que l’album sort, on n’a sûrement pas fini de le faire tourner dans les mange-disque. Teeth Out Pt. II, à qui il revient de le conclure, assure le job dans une effluve de brouillard, au ralenti, dans un climat fantomatique. Ce Becoming undone est une sorte de drogue sonore, (mal)saine, dont l’écoute peut rapidement engendrer la dépendance. A contre-courant, personnel et influent, il dote Adult d’une nouvelle étape décisive, au gré d’un parcours d’ores et déjà fourni autant que probant.