Les Lignes Droites, c’est 5 gaillards basés à Paris mais venus d’un peu partout, qui ont pour nom et fonction Bruno Ronzani (chant), Nicolas Mangione (batterie), Bruno Pourtier (basse), Mathieu Weiler (guitare) et Gabriel Pornet (claviers). Je les nomme car ma découverte, avec leur Karl de vice et de velours, mérite bien qu’on clame leurs patronymes. Ils n’en sont pas à leur coup d’essai, certes. Mais l’allant, les mots et maux, l’acidité de l’opus -leur second, si j’ai bien suivi-, ses gimmicks fatals et titres tantôt nuancés, tantôt right in your face (un jouissivement fougueux Mickey Mickey, clippé plus bas) font que tout comme avec un disque de Chasseur, je m’incline. Ne nous perdons toutefois pas en descriptifs admiratifs, Dans la chaleur nous impose la sienne (de chaleur, un brin tourmentée) et en se retenant, racé, sous-tendu en arrière-plan, fait mouche sans se montrer trop farouche mais en faisant valoir, néanmoins, des encarts écorchés. Arrive ensuite le Mickey Mickey mentionné en début d’article, filant, électro-cold, élevé dans ce qu’il narre et doté de guitares en couple avec des motifs délicieux. Le genre de titre qu’on se rejoue maladivement, tel un dément criant le nom de sa maman.
Plus loin Détends-toi, de ses loopings de sons vrillés, assène une troisième salve dark, martiale, aux vocaux hypnotiques. Je me demande comment j’ai pu, moi le fouineur invétéré, devoir attendre Karl pour jubiler au son de Lignes pas si Droites que ça. Tous des Karl -on en sera, effectivement, après audition poussée-, frénétique, indus un peu, batailleur toujours, Killing Joke -et je ne blague pas- dans ses sonorités, complète le tableau sans défaillir. Ni faillir. T’es où dans le graphe suit, aérien mais, ça n’empêche, intense. Et dense, car bien orné, bridé mais au bord du ravin. Dont il se garde bien, mélodique et superbement poppy. Mais griffu, et vivace. Il m’oblige, ce Karl, à surenchérir dans le détail, dans la louange. Je me suis perdu, c’est déjà Des eaux, des lacs qui me coule dans les esgourdes et stimule mon circuit de la récompense. J’ai décrit deux titres à la fois, c’est dire à quel point l’opus influe sur mon écriture.
Photo Alexis Vettoretti.
Avec A ma rétine on se love, magnifique, dans un écrin à la joliesse noisy. Le charme opère: Laisse donc joue, lui, une cold-wave sonique, racée, orageuse. Pardon! lui succède, truffé de bruits sombres, urgent, indispensable. Comme Karl dans son entièreté. Il breake, son chant dévie. Puis le tumulte revient, bien mis dans sa dégaine de tempête bruitiste. Tous des Karl II, digne prolongement à son premier volet, laisse ses synthés crachoter, tisser des canevas agités. Fichtre, quel disque! J’en suis dingue mais c’est sa faute, il m’a fait du gringue. Insoumis, obscur et éclairé, il me correspond. Muted, son ultime giclée givrée, cold et alerte, achève d’en faire un must. Je n’épiloguerai pas, Karl est de ceux qui ne se saisissent que par l’écoute, obsédée. Au terme de celle(s)-ci(s) vous débusquerez, splendide, l’une des galettes les plus attractives de cette fin janvier pourtant riche en sorties significatives.