Nous eûmes à l’ASCA de Beauvais, en cette fin d’année, Tamar Aphek avec les Buttshakers. Puis La Phaze, comme si c’était trop peu. Et pour couronner le tout, le maestro Rodolphe Burger qu’honore cet écrit. Avec, en guise de sparring-partner, les locaux-départementaux de Square. Soit une partie de Nijinski, que j’avais vu l’été dernier aux Scènes d’Eté de Beauvais, mais en mieux…à mon sens. Mais pas de blah-blah, seul compte le résultat et pour le coup, après avoir croisé le sieur Burger en personne à notre arrivée, à l’entrée de l’ASCA, nous fumes conquis par Square dont le leader-chanteur Olivier Delamarre, ex-King Size et c’est pas rien, parait avoir transcendé l’impact. Le bonhomme a du vécu, il s’appuie dessus, se fait un peu théâtral mais sans en rajouter, use d’un verbe élevé et de postures à la Darc/Brel. Si si je vous assure, il a de la tenue et à côté de lui, on joue un rock poétique, raffiné -parfois trop-, d’une belle dégaine. On ne meurt pas longtemps, prétend l’un des titres joués (et clippés, qu’on se le dise) en l’occurrence. Le set des Isariens, lui, est bien vivant, plaisant de bout en bout. Trop poli certes, pour mes esgourdes dopés au larsen et autres fuzzeries. Mais exécuté avec implication, à l’unisson, sans la moindre faute rédhibitoire. C’est une surprise qui se prend, je subodorais un set sans réel relief mais le groupe a visiblement, et ça s’entend, gagné en coffre.
Square.
Un second Picon-bière s’impose alors, le temps que l’ancien Kat Onoma s’en vienne fouler les planches de l’Ouvre-Boite. En trio, flanqué de son batteur et de Sarah Murcia, il débute par un Happy hour au doux-amer pétri de prestance. Suit Valse hésitation, en feutrine et en pure classe. Dans un climat distingué, lettré, digne de sa personne. D’emblée, la patte Burger est imprimée. Parfumé d’elle, empreint de la même atmosphère aussi prenante qu’élégante, en rajoute une louchée. Rodolphe égrène ses mots, précieux (je parle, bien entendu, des mots en question). Bleu bac, dans sa parure bluesy animée, puis Le chant des pistes et son duel vocal notable raflent la mise avec autant de facilité. C’est Rodolphe Burger, messieurs-dames. L’Alsacien aligne les perles, nous offre d’éparses incartades sauvages tirées d’une guitare qui n’en finit plus d’étinceler. Il est bien épaulé, outre son « cogneur » sans failles on relève le brio de Sarah et à trois, ni une ni deux, ces trublions nous jouent un live que bien peu peuvent égaler. C’est la régalade, Family dingo sème un boucan impétueux et avant ça, d’autres compositions auront accru l’éclat du set. Mushroom, clin d’oeil à Can, marie soie et crissements. On est transporté, John and Mary extrait du fabuleux Far from the pictures de Kat Onoma expire lui aussi un soufre resplendissant.
Rodolphe Burger.
J’aurais pu, peut-être même du, mentionner tous les morceaux livrés. Je ne le ferai toutefois pas, tu n’avais qu’à venir toi l’absent. Que sera votre vie, dans son écorce rock autant pure que dure, voit le maître s’emporter, sa guitare couiner, rugir. Avant ce « bazar » (Arno, si tu me lis…) Moonshiner, pépite groovy, aura fait son effet et même plus. La chambre, concentré de pureté, de beauté sonore et sémantique, clôt les débats. C’est presque religieusement qu’ensemble, nous avons vécu ce concert coché et surligné, depuis belle lurette, dans la calendrier 2021 des venues scéniques qui optimisent ta life. Qui te mettent des étoiles dans la tête, gorgée de souvenirs qui sont loin d’être les pires. A l’issue Rodolphe Burger, accoudé au Barasca, devise peinard avec d’autres êtres. On le salue bien bas, c’est le moins que l’on puisse faire, avant d’arpenter le bitume sans amertume aucune, en le remerciant pour une prestation très largement à la hauteur de que nous pouvions légitimement en attendre.
Rodolphe Burger.
Photos Will Dum.