Oeuvre d’un groupe français, sorti à la base en 2001, sur le label Ultraviolet, le non wake up clocks de my own se voit réédité par une tripotée de labels bien connus dans nos colonnes. Ses membres ont partagé des dates avec Blonde Redhead, Shipping News, Ulan Bator, Unwound, Billy Mahonie, Purr, Playdoh, Patton ou encore Heliogabale, ni plus ni moins. Ce disque est une pépite indé aux relents noise que sucre une voix féminine et qu’accompagne « other tracks« , qui compile morceaux introuvables, rares et pour certains inédits. Trêve de blah-blah, Seventeen lance la danse dans un canevas noise sur lit de notes claires et chant mélodique. D’emblée, on décèle une touche, un son, qui nous replongent en pleines 90’s. This good long walk, bien plus étendu, se pare lui de motifs post et, changeant dans ses atours, rafle les suffrages sans avoir à forcer le trait. Il breake, se saccade, son chant devient mutin façon Kim Gordon. De bons gros riffs découpent le ciel, la « pré-fin » du morceau tient d’ailleurs en un orage noisy que Sonic Youth n’aurait pas renié. On tape, s’il revient à un format court, se montre orageux autant que céleste vocalement. my own empile les trésors, Handful of stones ondule sous l’effet de la basse, en symbiose avec une batterie souple. Survient l’écart, comme de coutume, qui met tout le monde d’accord. Des stridences et fulgurances maison, qui tranchent avec les contours mélodiques de la plupart des compositions.
Avec A link, en moins de deux minutes, on a face à nous du post-rock feutré, ombrageux. Dolores B.Knl percute ensuite, dense et serpentant. my own, dont certains membres sont encore actifs (Zoé Wolf officie dans The Konki Duet, Hugues Villette chez Von Magnet et à présent dans Meta meat ainsi que 2kilos&more), se hisse au niveau des références de son genre. Polymino, climatique, a des airs d’interlude tranquille, bien que troublé en son fond. Lui succède Concrete, taillé dans une recette efficiente; rythme en vagues, jeu clair/dissonant, ruades bruitistes, breaks qui calment la tempête, voix songeuse. On alterne, sur le disque -magnifique dans son vinyle blanc-, entre pièces brèves et formats longs sans fauter une seule seconde. Seventy chuchote, impose sa finesse sans générer d’implosion. Link B, en dépassant à peine la minute, éclaircit lui aussi la palette. Puis Une conversation difficile -normal au vu du boucan qu’il produit-, pesant, poste huit minutes en torrent noise allégé par des incrustes modérées. Là encore, on a droit à des sautes d’humeur bien en place, à cette succession rage-tempérance-faux calme qui, régulièrement, porte my own aux cimes. C’en est fini avec l’opus, mais un foutu bonus nous est offert avec other tracks qui recense, tout de même, neuf titres au total..
Le premier d’entre eux, A whole fucking year (Epilogue) se déploie dans la douceur, porté par le chant de Zoé. A l’écoute, je pense sans cesse à Well Spotted, Deity Guns ou Heliogabale. Des noms plus qu’estimables, pour un recueil qui l’est tout autant. Ododiul, superbissime, narre et laisse filtrer des sons barrés, psyché, tordus, presque indus parfois. Périfluide rugit, avec style. On aime, chez my own, laisser les guitares déborder, le rythme errer à l’envi. Piétons arrive, dans une ambiance à la early Sonic (Youth bien sûr). 4.4.3 suit, offensif, doté d’une voix plus urgente qu’à l’habitude. Il groove, regorge de sonorités addictives, d’embardées sauvages. Last but one offre des mélodies écorchées, par les guitares. On est, une fois de plus, dans la variation rythmique, dans l’assaut sonore jamais linéaire. Bulgarian, direct et très Drive Blind ère Wrecking, prolonge le plaisir. Il marie les chants, livre un rock mélodique et entrainant qui n’oublie pas de bruisser. Quel régal que cette ressortie! Pour tout juste 15 euros, on aurait tort de s’en dispenser. Coalps, dans une pop sensible et agitée, laisse poindre la toute fin dans une bien belle dégaine. Il hausse le ton sur son terme, attractif au possible.
On est décidément gâté, l’idée est royale et le contenu diablement magnétique. The room gets bigger and bigger, pour finir, monte en pression, magnifique, en contournant l’éruption. On s’en va remercier les cinq structures mobilisées autour de la réédition, royale. C’est un bonheur sans nom, racé et griffeur, que ce double jet qui, je l’espère, donnera d’autres idées de « reissues » aux acteurs l’ayant remis au goût du jour. Bon nombre d’opus tombés dans l’oubli méritent en effet, à l’image de celui-ci, de ressortir des tiroirs. Pour l’heure, et c’est déjà beaucoup, nous avons ce non wake up clocks + other tracks de tout premier ordre à nous envoyer, sans modération, dans les écoutilles. Un manifeste de rock noisy, sauvage et pourtant nacré, qu’il importait de faire à nouveau retentir.