Après le superbe The Wasted Years et The Violent Years qui recensaient albums et 45s, Fire Records remet The Jazz Butcher au goût du jour avec Dr Cholmondley Repents: A-sides, B-Sides and Seasides. En 4 CD couplés à un livret, ce dernier rassemble les A, B et « C » sides du groupe, ainsi qu’une session KCRW datant de 1989. Une pépite, un superbe objet et évidemment, un régal pour tout amateur de la clique indé d’Oxford, autrice d’une palanquée de sorties magistrales dans les late 80’s et tout au long des 90’s. Pat Fish n’étant plus, le coffret n’en est que plus significatif encore et permet, de titre en titre, de prendre la mesure de son génie dans l’élaboration d’hymnes rock écorchés, parfois plus nuancés (un superbe The Human Jungle (12″ Extended Mix), par exemple, sur le premier support). En 58 titres dont le tout premier, Southern Mark Smith (Original 45), souffle un rock de classe et de fougue, l’acquéreur tirera le plus grand profit d’une formation non seulement prolifique, mais aussi immanquablement fiable, sans discontinuer, en termes de qualité dans le rendu. Jazz Butcher -v- Count Dracula (B-side of Mark Smith) suit, façon Cramps dans la déjante. Marnie (Miaow Mix) surgit ensuite, exotique, un brin surfy/folky, encanaillé par les chants.
En trois pièces, on a déjà un aperçu captivant de ce à quoi pouvait s’adonner The Jazz Butcher. Roadrunner (Richman) (12″ Version) crache un rock, à nouveau, à l’arrache autant que distingué. Ca twiste, c’est sauvage et dynamique, pétri de style. D’un niveau supérieur, à vrai dire, qui fait qu’entre les différentes « sides », l’impact reste égal et conséquent. L’enragé Sixteen Years (CD single Version), fonceur, Real Men (12″ Version), cold et post-punk, truffé de sons lunaires, suscitent entre autres un enthousiasme digne de l’accroche créée. Plus loin, s’agissant des « faces B », D.R.I.N.K. (Roadrunner B-side) impose sa splendeur jazzy. Ce n’est que le début, s’ensuivent alors de nombreuses autres merveilles parmi lesquelles je citerai The Jazz Butcher Meets the Prime Minister (Real Men 12″ B-side), qui m’évoque The Fall, pour faire court. Puis The Devil Is My Friend (Human Jungle 12″ B-side), exercice country speedé du plus bel effet. Ou encore Grooving In The Bus Lane (Hard 12″ B-side), au galop, urgent, dans une vêture bluesy bien rêche. En notant, au passage, l’apport de voix mélodieuses. On a même ce Vodka Girls (Abus Dangereux magazine compilation), pour se rapprocher de chez nous, d’un rock derechef alerte et bien mis. Quels que soient l’origine du morceau, le genre mis en avant, The Jazz Butcher fait mouche. L’objet est à posséder, il nous « coutera » son lot de plaisirs sonores non feints. Même lorsque, veloutés, adoucis, les Anglais troussent un South America (Distressed Gentlefolk CD only track) à l’ornement dépaysant.
Credit: ruth@filmfolk.tv
Un peu plus loin, on relève donc l’incroyable valeur des « faces C » ou Seasides, quand bien même on s’égare un peu dans cet indispensable amas de plages envoûtantes. A commencer par Forever (Conspiracy 12″ Version) qui lui aussi se fait doucereux, dans la magnificence. Peter Lorre (Conspiracy 12″ B-side) suivant, lo-fi, noisy par endroits, crooner aussi dans le chant. The Jazz Butcher est large, performant en toute occurrence. City Of Night (50,000 Glass Fans Can’t Be Wrong compilation) le démontre, spatial, très « Glass » au final. Chant sensible, trame subtile et animée. On est, ici, dans des efforts moins pénétrants qu’à l’habitude, mais d’une portée tout aussi estimable. Thing (Hard 12″ B-side), dans une parure folk à nu, et dans son sillage Rebecca Wants Her Bike Back (Angels 12″ B-side), qui renoue avec un déroulé offensif et appuyé, en remettent une louche. On se surprend, quand ailleurs on « zappe » parfois quelques titres, à s’envoyer Dr Cholmondley Repents: A-sides, B-Sides and Seasides dans son entièreté. En y découvrant, à chaque passage, de nouveaux détails qui forcent l’adhésion. The Jazz Butcher est de ceux qui, à l’image de ce qu’initie Fire Records, ne peut être passé sous silence. Il importe, à l’inverse, d’en valoriser l’apport et c’est chose faite, pour le coup, avec maestria. J’ai du passer, temps et format obligent, assez brièvement sur les trois premières parties. L’écoute vous en dévoilera toute la richesse et à l’issue, vous aurez face à vous une Session live percutante.
De New Invention (Live KCRW Session 1989), pop-rock « maison » aux portes du tubesque, hérissé, à Looking For Lot 49 (Live KCRW Session 1989) qui ferme la marche au gré d’une énergie punk, c’est pour le coup la force live du groupe qui vient à bout de nous tous. Comme dit plus The Jazz Butcher, qu’il s’agisse de titres en public, de morceaux reconnus ou de chansons tirées de formats inédits, fait bien mieux que de tirer son épingle du jeu. Le saxo de Girl-Go (12″ Mix), son délié éclatant. New Invention (12″ Version) aussi, et son rock élégant autant que mordant, quand je repasse à l’écoute, m’enchantent une fois de plus et à la prochaine audition, je m’extasierai pour d’autres encore. Il n’y a là que trésors, on ne peut par conséquent qua saluer le brio et l’excellence affichés sur une ribambelle de compositions élevées, variées et indispensables, compilées qui plus est sur un objet de toute beauté. Lequel, couplé aux deux autres mentionnés en début d’article, se doit de trôner sur toute « musiquothèque » digne de nom.