Artiste jeune puisqu’âgée de 21 ans, bien plus « datée » s’agissant de ses sorties sur sillons -ce Public storage, en effet, est sa quatrième galette, la première pour Ghostly International-, Hana Vu évolue dans une veine indé marquée, pour l’album en question, par les bâtiments de storage à côté desquels elle vivait lorsqu’elle a commencé à l’écrire. Après deux premiers albums autoproduits elle s’est attiré les faveurs de Gorilla vs. Bear, un site musical qui sortira deux albums sur son label Luminelle Recordings. Sa route, par conséquent est déjà longue et Public storage, dans sa douzaine de titres mélodiques qui peuvent s’enfiévrer, contient très largement de quoi faire notre bonheur. April Fool débute dans la finesse, ténu, sensible. Son pouls est toutefois rapide, son décor mesuré. Première belle salve, que relaie un titre éponyme marquant, d’une part, de par son chant et d’autre part, par son mid-tempo ombragé qui s’incruste dans les coeurs et ne rechigne pas à se parer de guitares enhardies. Et c’est parti, j’adhère. Aubade, au synthés en vue, gimmicks en poche, m’y incite d’autant plus. Il est alerte, mélodiquement entrainant. Heaven se fait plus doux, mais pas moins concluant, porté par des airs légers.
Au tiers de l’opus, Hana Vu a déjà fait ses preuves. Il importe, toutefois, de continuer sur ce ton et Keeper, petite perle obscure et sautillante, se charge de rassurer son monde: c’est sur la durée, on le pressentait, que la californienne nous séduira. Pour ça elle recourt aux petits sons qui font la décision, à des climats sans excès, doux-amers, bien ajustés. Gutter, aux guitares bourrues sur rythme bridé, fait son effet. On ne s’ennuie pas, Public Storage est loin de faire dans l’uniforme. C’est de l’indé de choix, notons au passage que c’est la première fois qu’ Hana Vu fait appel à un coproducteur: Jackson Phillips (Day Wave). Bien lui en prend, le résultat navigue dans les eaux de l’excellence. Il faut aussi dire que chez Ghostly International, il est rare que l’on badine avec la qualité. My House, dans une quiétude qui s’emballe, au mitan de l’avenant et du plus mordant, l’illustre fort bien.
Après lui World’s Worst -on ne dira pas le contraire- pose ses élans aux sonorités d’Orient, s’emporte lui aussi et dans la beauté. Décoré avec un goût certain, il précède Anything Striking qui, de son côté, opte pour un déroulé paresseux que la batterie trouble et anime. Et, bien évidement, du brio dans les notes qui l’ourlent. Il prend fin, Everybody’s Birthday se présente et persuade, de manière définitive, celui qui manifesterait une forme de doute. Dans sa posture aigre-douce, mâtinée d’encarts d’obédience rock, Hana Vu est parfaitement à son aise, à sa place. Etonnamment mature, en termes d’écriture comme dans l’impact émanant de ses chansons, elle nous sert pour finir, en avant-dernière position, I Got. Un effort posé, élégant, à dominante atmosphérique. On est conquis puisque qu’à aucun moment, Public Storage n’a pu déplaire.
En toute fin de course Maker, paré de sons folk chatoyants/dépaysants, pose une ultime banderille. Il reste posé, menace de s’encolérer, mais n’y accède pas. J’aurais souhaité, pour finir, un peu plus d’écorchure. Du plus sale, de la poudre de bruit. Ce n’est pas le cas mais le disque, brillant, mérite de toute façon tous les égards. Hana Vu, « jeune routarde » au cheminement d’ores et déjà probant, y fait montre d’une adresse et d’un talent qui augurent du meilleur quant à la suite de ses pérégrinations artistiques.